Pour savoir ce qui se passait à Saint Eloi, Stéphane n’avait trouvé qu’un moyen. Et il était sombre. Très sombre et dangereux. Ainsi, une fois ses amis partis, il avait enfilé sa casquette et était sorti direction l’horloge. Si les choses avaient vraiment changé, l’horloge serait le moyen de le constater. Et il n’y croyait pas vraiment. Alors qu’il remontait la rue de la maison de quartier il crut voir de ci de là des appartements vides avec des lumières allumées. Bizarre. Quand il rejoint l’avenue Hoche, les braises finissaient de se consumer dans les bidons d’essence de la bloc party mais il n’ y avait plus personne. Le calme régnait si fort que l’on n’entendait que les rares voitures qui circulaient à cette heure. Et elles ne s’arrêtaient pas. Il fut surpris de ne croiser aucune voiture de police, aucun camion de pompiers, de n’entendre aucune sirène. Vraiment bizarre. Il finit par arriver à une encâblure de l’horloge et crut entendre une porte qui s’ouvrait et claquait en se refermant. Quand il arriva devant, il constata que les portes avaient été changées et sécurisées. Et qu’elles n’étaient pas dégradées. A l’intérieur de la cour du bloc d’immeuble le matériel urbain qui y avait été installé ne souffrait aucune dégradation. Il se passait vraiment quelque chose à Saint Eloi. Stéphane fit demi tour et se plaça pile sous l’arche de l’horloge. Vue imprenable sur Saint Eloi. Et aucune activité. Le quartier ressemblait à ce pourquoi il avait été dessiné. Une cité dortoir. Au bout d’un bon quart d’heure, il prit son courage à deux mains et décida d’en avoir le cœur net. - Putain tu me réveilles mon gars ! - Tu dors la nuit maintenant toi ? - Les temps changent mon vieux. Qu’est ce que je peux faire pour toi ? - M’expliquer. - T’expliquer quoi ? - Ramènes tes fesses et je te le dirais. - T’es où ? - Devines. - Ok. Laisses moi cinq minutes. - 4 minutes 59...58… Norman raccrocha en grommelant. Stéphane rangea son portable et fit le pied de grue jusqu’à deviner la silhouette du dealer sur sa droite. Il venait du vieux Saint Eloi. Les choses changeaient vraiment pensait il. - Alors tu t’es rangé c’est ça ? - Qu’est ce que ça peut te foutre ? Qu’est ce qu’il y a que tu veux que je t’expliques ? La vie ? - Pauv’ con. Où est ton armée ? - Mon armée ? T’es encore plus vieux que t’en as l’air. Stéphane écarta les bras comme pour embrasser tout le territoire. Norman sourit alors. Un sourire vicieux. Pleins de sous entendus. - Tu m’expliques ? - Y’a rien à expliquer, avec toute cette merde de nouveau quartier et de solidarité on fait profil bas, c’est plein de barbouzes partout. - C’est eux dans les appart’ vides ? Norman tiqua. Stéphane avait vu quelque chose qu’il n’aurait pas voir. Norman se reprit aussitôt et fit mine d’être fataliste. - Voila. Avec ces conneries on peut même plus sortir la nuit. - Donc tu dors. - Donc je dors. - Prends moi pour un con. - Je t… La sirène de police leur fit porter les mains aux oreilles. Puis la lumière de la lampe du policier leur fit baisser les yeux et instinctivement lever les bras. - Bonsoir messieurs. Vos papiers.
Un nouveau Saint Eloi - 16
L’ANTIDOTE
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