Aurélien s’affairait à remplir les rayons comme Stéphane encaissait quelques achats jusqu’à ce que la file se tarisse et qu’il aille chercher un exemplaire du journal sur le présentoir. Il retourna à la caisse et leva le regard vers l’entrée du magasin. Il était bientôt 8 heures et le flots des travailleurs matinaux était passé. Il s’autorisa alors à lire La Nouvelle Presse du Centre. Le titre était ronflant. « Nuit de Terreur sur Poitiers ». Et pour illustrer tout cela, la place de Coïmbra avec La Poste et le Commissariat local complètement calciné. Il ouvrit le journal et commença par constater que Saint Éloi n’était jamais cité. Pour une fois, le quartier ne faisait pas parler de lui. Enfin officiellement. Ces magasins n’avaient pas brûlé comme cela. Il n’y avait guère de doute que les habitants des Couronneries n’étaient pas les seuls impliqués. Bref. Au lieu de se perdre en conjecture, il lut l’histoire du Boucher des Couronneries. Un des derniers pionniers de la nouvelle Poitiers. Il avait toujours vécu dans le quartier depuis qu’il était sorti de terre. Il fut surpris d’apprendre qu’il n’était pas mort mais en urgence vitale tant le papier ressemblait à une nécrologie. Le type, une certain André Ligeonnières vivait au dessus de son commerce et avait été pris par les flammes de son commerce incendié. Un témoignage du boulanger expliquait qu’il était en colère car jamais il n’avait été mêlé à quoi que ce soit. Il recevait tout le monde avec la même rigueur. Mouais. Il continua à tourner les pages du journal et tomba sur une photo de Jean. L’article expliquait qu’il venait de reprendre ses fonctions de commissaire de la Police de Poitiers. Il lut l’article en entier et nota que rien n’expliquait le départ de Langlet ni les 3 dernières années d’activités de Jean si ce n’est un sibyllin « au service de l’État à Paris ». Sacré Jean. On pouvait toujours mettre sa photo, personne ne pourrait se souvenir de lui quand même. - Patron ? - Oui ? - J’ai une idée. - Ah. A quel propos ? - La picole. C’était un problème depuis quelques semaines, son accès en libre service avait conduit à des vols de plus en plus récurrents. En sachant que c’était ce qu’ils vendaient le plus passé 19 heures, cela devenait un manque à gagner de plus en plus important. - Je t’écoute. - Il faut les mettre derrière le comptoir. Il faut que nous soyons les seuls à pouvoir les donner. Sans parler qu’on est pas raccord avec la législation vis à vis des mineurs, cela nous permettrait de mieux contrôler la vente. Stéphane allait lui répondre qu’il trouvait son idée séduisante mais difficilement réalisable compte tenu de l’agencement du magasin quand la sonnette retentit. Deux hommes entrèrent, l’un avec une chemise à la main. Encore des démarcheurs contre l’excision en Afrique ou le viol en Ukraine. Il prépara son stylo, histoire de perdre un minimum de temps. - M. Peyroux ? - Lui même. Que puis je pour vous messieurs ? - Je suis Jean Bousquet, le boulanger de la place de l’Europe. Et voici Jean Dublin le Président des commerçants des Couronneries. Nous venons pour vous demander votre soutien. - C’est-à-dire ? Quel type de soutien ? - Je vois que vous avez lu la presse. Vous savez sans doute ce qui s’est passé la nuit dernière. - Oui en effet. Je suis vraiment désolé pour vous. - Nous ne sommes pas là pour moi. Mais pour André. - André ? - André Ligeonnières. Le boucher de la place. - Oh, c’est son nom. Comment va t il ? - Il est brûlé au 2nd degré sur plus de 50 % de son corps. Autant vous dire qu’il ne va pas bien. - Et que puis je faire pour vous ? - Nous aider à financer notre propre enquête.
L’esprit de famille - 03
L’ANTIDOTE
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