- Monsieur ? - Oui Jocelyne ? - Le directeur de l’agence de la Poste souhaiterait vous rencontrer. - Pas de problème. Quand ? - Tout de suite , monsieur. - Bien. Dites lui d’avancer. - Tout de suite, monsieur. L’homme avait entre 40 et 50 ans. Il avait un costume impeccable comme pour cacher les cernes et les traits tirés qui ravageaient son visage. A son bras, une sacoche plus épaisse qu’un dictionnaire. De toute évidence, il avait des soucis. De gros soucis. - Je vous en prie installez vous. Que puis je pour vous ? L’homme s’assit sur le fauteuil près de la porte. En regardant par la fenêtre. Traumatisé, le type. - C’est sûr ici, ne vous mettez pas la rate au court bouillon. - C’est aussi ce que je pensais il y a 72 heures. - Je vois. Alors ? Que puis je pour vous ? L’homme ouvrit sa sacoche et sortit du maelstrom de dossiers, une simple feuille recto verso et la tendit à Noé. Celui ci s’en saisit et commença à la lire en diagonale. Le contrat d’assurance d’André Ligeonnière. Un contrat d’assurance classique. Noé lui retendit le document en se demandant bien ce que ce confrère voulait. - Oui. Il est assuré. Tant mieux pour lui. - C’est-à-dire que non. - Comment ça non ? - Il est assuré. Mais pas pour les émeutes et le vandalisme. - Ah. Et en quoi le Crédit Populaire pourrait vous aider ? Je ne saisis pas. L’homme sortit cette fois ci le reste de sa sacoche envahissant le bureau parfaitement ordonné de Noé. Il feuilleta ce qui ressemblait au manuel du parfait banquier postal et finit par sortir une feuille du lot. Il prit le temps de la lire. Noé, lui, commençait à s’impatienter. Surtout il sentait venir le plan foireux. Foireux de bout en bout. - Voilà. Lisez les notes de bas de pages. Noé prit à nouveau le second document du postier et comprit aussitôt ce qu’il voulait. - Vous voulez que je vous assure ? - Oui. - Vous feriez mieux de faire appel à ceux dont c’est le métier, non ? Vous savez qu’il existe des assureurs qui assurent les assureurs quand même ? - Oui, oui. Mais je sens pas ce coup là. Ils me couvriront jamais. - Pourquoi ? - Parce que c’est moi qui est dit à Ligeonnières que ce n’était pas nécessaire de s’assurer contre ce genre de sinistre. Noé s’enfonça dans son fauteuil et croisa les mains en fixant le bonhomme. Il commençait à comprendre. Le type ne venait pas pour son agence. Il venait pour lui. Il venait pour trouver quelqu’un qui le fournirait le soutien dont il allait avoir besoin. - Vous voulez que je vous assure vous, donc. - Exactement. - Je peux le faire, en effet. Vous assurer via une responsabilité professionnelle. Elle vous octroiera même, selon la formule que vous choisirez, une assistance juridique. Le problème, monsieur… - Durant. Jacques Durant. - Le problème monsieur Durant c’est qu’elle ne pourra en aucun cas vous couvrir par rapport à votre erreur. - Pourquoi ? - Parce que nos contrats, comme les vôtres j’en suis sûr, ne peuvent être rétroactifs. Le type se tortilla sur sa chaise et commença à farfouiller dans sa poche de veste. Noé lui fit signe d’arrêter tout de suite ce qu’il s’apprêtait à faire. - Ne vous mettez pas plus dans l’embarras que vous ne l’êtes, s’il vous plaît.
L’esprit de famille - 05
L’ANTIDOTE
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