Noé regardait son écran et ne savait pas quoi en penser. Il lisait et relisait les chiffres mais aucune logique n’en sortait. Pas même un soupçon ou une éventuelle vérité. Oui. Tout cela était particulièrement erratique. Depuis le décès de Ligeonnières, les mouvements ne s’étaient pas arrêtés sur son compte professionnel. Dans un sens cela était normal puisqu’ils étaient trois à y avoir accès. Seulement, il y avait autant de dépôts que de retrait. Noé soupira et essaya de se connecter au compte ouvert pour accueillir les fonds récoltés par son comité de soutien. Rien. Zéro. Nada. Alors, il craqua le code pour connaître les noms des trois (comme par hasard) personnes gérant ce compte. Une alerte sécurité s’ouvrit. Merde. La routine d’Hakim avait été démasqué. Il ferma aussitôt toutes ses fenêtres et se leva pour prendre son ballon. Et réfléchir. Sur la place, les services de la municipalité s’activaient à remettre ce qu’ils pouvaient en état. Et cela risquait de durer. Les types étaient allés jusqu’à entrer dans le commissariat. Il n’en restait rien. Plus de matériel. Plus de dossier. Cela ressemblait à un reset pour une grande partie des voyous du quartier. Une idée vint heurter le cortex de Noé. Il arrêta de faire tourner son ballon entre ses mains et fixa le camion poubelle comme s’il voyait à travers. Et si… Et si ceux qui avaient été touchés ne l’avaient pas été par hasard ? Oui. Et si les assaillaints avaient ciblé leurs victimes ? Dans ce cas pourquoi aller jusqu’à brûler le seul boucher du quartier ? Et pourquoi ne pas brûler les commerces de ses soutiens qui, il n’en avait plus aucun doute, étaient aussi ses partenaires et ses amis ? Parce qu’ils avaient eu peur des conséquences. OK. Ça se tenait. Mais pourquoi ? Noé rouvrit le logiciel d’accès au compte de Ligeonnières et, là, il pouvait savoir qui l’avait géré. Claude Marquet. Fleuriste place de l’Europe. Épargné par les émeutiers. Pierre Dumontiers. Gérant du Super U. Épargné par les émeutiers. Jean Bousquet. Boulanger. Épargné par les émeutiers. Et tous trois avaient déposés l’équivalent de 5 000€ sur le compte professionnel d’André Ligeonnières. Noé devait en avoir le cœur net. - Oui allô ? - Monsieur Bousquet ? - Lui même. - Noé Ouedraougo. - Encore vous, écou… - A quoi correspondent les fonds que vous avez déposé sur le compte professionnel de André Ligeonnières le jour de son décès ? - A votre avis ? - Je n’ai pas d’avis Monsieur Bousquet, juste des chiffres dont je ne comprends pas la présence. Noé entendit clairement Bousquet demander à ceux qui l’entouraient de « fermer leurs putains de gueules » avant de soupirer. - Il faut qu’on se voit Monsieur Oudrogo. Je crois que notre relation a commencé sur de mauvaises bases.
L’esprit de famille - 11
L’ANTIDOTE
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