Karim n’était pas habitué à ce genre de service. Pas du tout. Et Aziz dont les ecchymoses de son visage restaient visibles ne l’étaient pas non plus. Ils s’arrêtèrent au bureau d’accueil du pavillon Toulouse du Centre Henri Laborit et demandèrent à voir Juliette Achour. La secrétaire prit son combiné puis leur indiqua de monter au premier étage et de sonner. La dame était avenante. Sur le chemin ils croisèrent infirmiers et patients. Tout paraissait calme. Et pourtant tout semblait sous tension. Une tension intérieure. Chacun jouait un rôle semblait il. Les patients semblaient aussi tourner en rond. Et les infirmiers en hypervigilance. Ce devait être ça la psy. Des gens dont l’esprit ne tournait plus rond. Et des soignants qui se devaient de l’anticiper. Ce qui fit penser à Karim qu’il ne pourrait jamais travailler avec un tel niveau d’attention. Deux volées de marches montées et ils étaient devant la porte de l’unité fermée se trouvait Juliette. Car c’était pour elle, la femme d’Aziz, qu’ils étaient là. Et pour comprendre aussi. Un aide soignant leur adressa un sourire de l’autre côté de la porte, une clé tourna et ils entrèrent dans l’unité. Aussitôt deux femmes vinrent vers eux. Elles voulaient voir ce qui se passait. Leur pathologies et les traitements faisaient d’elles des femmes brisées. Et leur était regard un brin pervers. L’aide soignant s’adressa à elles et elles retournèrent sans broncher dans la salle Télé. Quand ils arrivèrent une dizaine de mètres plus avant, l’aide soignant les introduit dans le bureau infirmier et ferma la porte. - Bonjour messieurs. - Bonjour. Je suis Aziz Achour, l’époux de Juliette Achour. Je voulais avoir de ses nouvelles et la voir. - Asseyez vous. - Je ne peux pas la voir ? - Je ne suis pas sûr que ce soit le moment M. Achour. - Mais… pourquoi ? - Vous le savez très bien. Karim, qui était resté debout se rappela ce que Aziz lui avait dit sur ses blessures. Il y a trois nuits Juliette s’était jeté sur lui et, sans qu’il ne puisse et veuille réagir elle l’avait roué de coups. Il avait été obligé de faire le 15 quand elle s’était dirigé vers la cuisine. Un monstre. Voilà ce qu’il avait dit à Karim pour décrire Juliette à ce moment. Rien à voir avec la femme qu’il aimait. Quand les ambulances étaient arrivés, elle pleurait et s’excusait, blottie dans les bras d’Aziz . - Qu’est ce qui lui arrive ? - Je peux vous poser quelques questions à son sujet ? - Oui bien sûr, si ça peut aider. - Votre femme est militaire, c’est ça ? - Oui, elle est adjudante au RIMA. - Elle y fait quoi ? - Elle s’occupe de la paie. Pourquoi ? - Elle n’a jamais été sur un terrain de guerre ? -… - Monsieur Achour ? C’est important. C’est important pour votre femme. - Oui. Mais sa dernière mission remonte à vingt ans. Afghanistan. Après le 11 novembre. - Elle faisait des cauchemars ? - Comme tout le monde. Dites est ce que je peux la voir ? - Votre femme n’est plus dans notre service. Je suis désolé. - Où est elle ? - Des militaires en tenue avec un papier officiel sont venus ce matin. Ils l’ont emmenés. - Où ? - Ça je ne le sais pas . - Qu’est ce qui lui arrive ? - Elle décompense un syndrome de stress post traumatique. Aziz se tourna vers Karim pour comprendre. Karim, lui avait tout compris. - Ca veut dire que ses cauchemars sont une réalité, Aziz. Et qu’elle les revit en boucle en ce moment.
Le gardien - 07
L’ANTIDOTE
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