Karim ne savait par commencer. Sous l’arche qui marquait le début du quartier, il se sentait perdu. Encore plus que la normale. Ce qui poussait son degré de vigilance à un niveau aussi élevé. Il respira un grand coup, laissa passer un pauvre bougre qui marmonnait dans sa barbe, une 8,6 à la main et s’avança. Arrivé à l’horloge déserte, il baissa un peu la garde pour regarder l’adresse que lui avait griffonné les parents de Caroline. L’écriture était maladroite, scolaire par endroit. Une écriture d’ouvrier immigré. Il releva la tête et souffla un bon coup. Sûr qu’il n’y avait que lui pour s’interroger sur les circonstances de la mort de cette femme. Il lança Google Maps et trouva qu’il n’avait que 300 mètres à faire. Premier bâtiment avenue Hoche. Deuxième étage. Appartement 218. Il arriva en dix foulées jusque devant la porte sécurisée et appuya sur toutes les sonnettes et attendit. Moins de dix secondes après le buzz résonna et il entra dans l’immeuble. L’odeur de javel lui saisit les narines. Comme si le hall d’entrée venait d’être passé au...kärcher. Il commença par appeler l’ascenseur. En attendant que l’engin se manifeste, une petite femme boulotte et blanche descendait les escaliers. C’était l’occasion. - Excusez moi. Excusez moi ! - … - Je cherche Caroline, vous savez si elle est là ? - Quel appartement ? - 218 - Foutez moi le camp, sale junkie ! Et la bonne femme de faire un détour dans le hall comme s’il était pestiféré. La porte de l’ascenseur s’ouvrit en même temps que celle de l’immeuble. Il s’engouffra à l’intérieur et appuya sur 2. « Sale junkie » ? Bordel. L’ascenseur avait été désinfecté et repeint lui aussi. Pas un tag. Pas d’odeur de clope ou de pisse. La javel, encore. Dans le couloir, la lumière s’alluma automatiquement. Re-Bordel. Stéphane devait avoir raison, le quartier avait changé. Etait en train de changer. Les choses semblaient comme neuves. Le Hall, l’ascenseur, le couloir. Il toqua à la porte 218. Quand elle s’ouvrit, ce fut pour faire place à une femme maghrébine qui se mit à lui parler en arabe dans un sourire. - Excusez moi, je ne comprends pas l’arabe. - Ah, excusez moi. Vous avez besoin de quelque chose ? - De quelqu’un en l’occurrence. Son regard devint noire et elle allait fermer la porte lorsque Karim comprit sa maladresse. - Ce n’est pas ce que vous croyez, je cherche Caroline. - Oh, Caroline ! Elle n’est pas venue depuis une semaine. - Vous la connaissiez ? - Bien sûr. Elle travaillait avec nous de temps à autre. Une fille bien. Vous êtes un ami ? - Pas vraiment. Je connais ses parents. Elle a disparu et ça les inquiète. Alors je suis venu voir si quelqu’un pourrait me dire où elle était. - Disparue ? Mon Dieu… Entrez. Karim suivit la jeune femme dans l’appartement. Il sentait le propre lui aussi. Quand il eurent traversé la petite entrée, ils arrivèrent dans une pièce nue et blanche avec un grande table en son centre et dans les coins des matelas gonflables et des duvets. Une refuge. - Qu’est ce que vous pouvez me dire ?
Un nouveau Saint Eloi - 18
L’ANTIDOTE
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