Le type, enfin le commissaire Langlet, ressemblait à une fouine. Ou à Eric Zemmour, le candidat qui n’en était pas un. Et ils étaient tout aussi antipathiques à Noé l’un que l’autre. Quelque chose de malsain semblait émaner de son regard. Quelque chose de mauvais. Bien qu’il soit arrivé à l’improviste, Noé l’avait reçu avec les honneurs que lui conféraient sa fonction. C’est-à-dire avec un espresso maison et des speculoos. Il n’avait touché ni à l’un ni à l’autre. Et n’avait pas non plus tourné autour du pot quant à la raison de sa venue. - Je vais avoir besoin de vous Monsieur Ouedraougo. De vous et de vos deux amis. Vous le savez, je débarque. Et je débarque de loin. Je ne connais ni la ville ni sa population, et tout ce que m’a laissé Monchaud ce sont vos trois noms. Alors j’ai besoin que vous me guidiez. Surtout sur ce qui cloche dans cette ville. Sur ceux qui se tapissent dans les ombres pour mieux emmerder tout le monde. - Je ne suis pas sûr de comprendre, M. le commissaire. - Appelez moi Yann - Si vous voulez mais je ne suis rien d’autre qu’un administré lambda. Bien sûr il m’arrive des problèmes mais pas plus qu’aux autres. Le commissaire, les coudes sur le bureau de Noé les yeux, petits et enfoncés plantés dans les siens, son nez en forme de museau presque à toucher celui de Noé, le fixa si intensément pendant deux secondes que Noé se sentit presque à poil. Puis il retira ses coudes du bureau et un sourire de biais barra son visage comme il se renfonçait dans sa chaise. - Je vois. On ne balance pas ici. Combien alors ? - Hein ? - Votre prix. Combien pour vos services ? - Ok, ok. Je crois qu’on va s’arrêter là. - Dommage. A quand remonte le dernier contrôle fiscal de votre couple ? Vous êtes bien de nouveau en couple, n’est ce pas ? La menace n’était même pas voilée. Le commissaire avait repris sa casquette d’apparat et le regardait, debout. Noé se leva à son tour, contrôlant difficilement ses nerfs et le toisa du haut de ses presque deux mètres. - Je n’ai jamais eu de contrôle fiscal, Monsieur le commissaire. Et si vous voulez mon avis, puisque c’est pour cela que vous êtes venu me voir, ne vous y prenez jamais comme ça avec les poitevins. Vous risqueriez d’avoir des petits soucis de dentition. Quant aux quartiers chauds de la ville et sa faune, vous avez des adjoints , non ? - Vous venez de passer le test, M. Ouedraougo ! Vous êtes bien comme me l’avait dit Monchaud. Droit et fiévreux. J’aurais une dernière question quand même. Vous avez des associations qui se sont nouvellement montées sur Saint Eloi ? Des associations caritatives. - Cela relève du secret professionnel. - Oh, vous et moi savons que l’on peut jouer avec, pas vrai ? - Sortez. Sortez maintenant. Ou je vous fous mon poing dans la gueule. Le commissaire partit dans un rire aigu désagréable avant d’ajuster sa casquette et de tirer sur les manches de sa veste. Il avait encore son sourire de travers lorsqu’il disparut de la vue de Noé. - Vous êtes bien comme me l’avait dit Monchaud. Droit et fiévreux. Ca vous jouera des tours. Noé eut envie de lui répondre qu’on lui avait déjà dit mais se ravisa. Ce type cherchait les embrouilles. Et s’embrouiller avec un commissaire divisionnaire de Police ce n’est pas la même chose qu’avec son n+1
Un nouveau Saint Eloi - 8
L’ANTIDOTE
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