Lepauvrebougren’avaitpassurvécuàlapertedesonbras.Ilfautdirequeleconfondre avecuntroncd’arbren’aidepas.Après35minutesdetentativederéanimation,Jérôme, l’urgentistedegardeavaitannoncéquel’onarrêtaitlesfrais.Leresteétaitàla charge de Karine et Karim. Faire le ménage.Le rendre présentable.Autant que faire se peut.Si quelque chose était encore possible.FernandPointraudétaitarrivéinconscient,sonavantbrasgauchedanslaglaceetdeux pompiersquiserelayaientpourstopperhémorragieprovenantdesonartèrebrachiale.Ca pissaitquandmême.Lavoieveineuseposéeenurgenceavaitlâché.Ilsavaientposéun cathéterartérieletcommencéleremplissage.Puislesscopess’étaientmisàsonner mauvais.Karimavaitprislepremierrelais.Uninstant,ilyavaientcru,enle transportantauseulblocouvert(COVIDoblige).Soncœurétaitreparti.Letransfertsur latabled’opérationavaitsuffiàtoutfoutreenl’air.Karimavaitdenouveauprisle premierrelais.Lesordresfusaientdanslecalme.LesIBODEpréparaientcequ’ilfallait pouruncautérisationmassive.Ilneretrouveraitjamaissonbras.Karimpassaaux insufflations.Sesbrascommençaientàluifairemal.Ledéfibrillateurleurordonnade s’écarteretlançasadécharge.Miracle.Soncoeurétaitreparti.Maisletempsde s’habiller et le pouls devint fuyant avant de s’éteindre.C’est là que Jérôme avait dit stop.De toute façon, après deux ACR, il était certainement en mort encéphalique.UnefoislesIBODE,IADE,ASdublocetlesmédecinspartis,KarineetKarimrecouvrèrent lecorpsetlerapatrièrentverslamorgue.Ilsnepouvaientpass’occuperdeluiavant les deux heures légales. - Qu’est ce qu’on fait du bras ?- Pffff, j’en sais rien.- Y’a pas un truc, genre une poubelle pour ça, ici ?- On verra à la morgue, Thibaut saura.- T’as raison.Ilsavancèrentverslesascenseurslesplusprochesetsonnèrentàl’entréedelamorgue. Thibaut leur ouvrit avec un mouvement de recul.- Bordel, vous l’avez dépecé ?- Non, bois, tronçonneuse, bras.- Je vois. Hémorragie massive. Putain, il est tout frais, ça pisse encore. Allez, avancez.KarimetsacollèguesuivirentThibautdanslescouloirsdelamorgueet,alorsqu’ils s’apprêtaientmachinalementàl’installerdansunechambrefroide,Thibautleurfitsigne de prendre à l’opposé.Évidemment.Les deux heures.- Tu veux qu’un de nous deux reste ?-Non,non,lelégistevapasseretpuispourunbûcheron,ilestloind’êtreimposant. Merci.- On se demandait…- Quoi ?- Ben le bras.- Comment ça le bras ?- Ca .Karine pointa la glacière où était stocké le membre du pauvre bougre.-Oh.Ça.Posezlemoiàl’entréedelachambren°1,jem’enoccuperaiplustard.Allez bonne journée.KarimditàKarinequ’ils’enoccupait.Ellenesefitpasprieretdéguerpitaussivite qu’ellelepouvait.KarimrestauninstantàregarderThibautfairesontravail.Cale fascinait.Calefascinaitdepouvoirexécutertouscesgestesavecuneréelledouceur sans sembler éprouver quoi que ce soit.- Putain comment tu fais, Thib ?- Comment je fais fais quoi ?- Ton boulot.-Ah.Disonsquejesuisleurdernierlienaveclasociété.Etquemonrôleestdeleur dire adieu avec la plus grande reconnaissance.- Un truc de samouraï.Thibaut tourna son regard vers Karim qui vit son visage s’illuminer.- Oui, y’a de ça. Allez fous le camp. Et n’oublie pas le bras.- Bon courage.- Toi aussi, mon pote.Karimpritlaglacièreetsortitdelasallefunérairepourrevenirsursespasetouvrir le chambre n°1. Il allait sortir lorsque son regard se posa sur l’étiquette d’un corps.Celui d’une femme.Merde.Il connaissait ce nom.