Stéphane avait 30 appels en absence des Jardins de Bonnes. On approchait 18h30 et il n’avait absolument rien vendu de sa journée. Il n’était allé chercher ni les salades du Jardin qui flippait que la bonne nouvelle soit sans doute une mauvaise blague et le boulanger qui de toute façon avait dû finir par vendre tout son pain. Par contre pour exactement la quatorzième fois de la journée il se leva de derrière son bureau et serra la main d’un jeune homme dont il ne souvenait même plus du nom qu’il lui avait donné 1/4 heure plus tôt. Il regarda Rose et Ibrahim et vit qu’ils étaient dans le même état que lui. Complètement sonnés. Il regarda vers la porte d’entrée et vit qu’il n’y avait plus personne. Sans rien dire il se rua sur le rideau et ferma son commerce avec pratiquement deux heures d’avance puis prit deux bières et un coca frais et la apporta jusqu’au bureau. Le coca pour Ibrahim, les bières pour Rose et lui. - Vous vous souvenez du nom du dernier ? - Impossible à dire. -Pas mieux. Ils éclatèrent tous les trois de rire au même moment et prirent quelques minutes pour savourer leur rafraîchissement et se dégourdir les jambes. Ils y étaient depuis 9h avec une demi heure de pause seulement à midi. Tout cela grâce à Ibrahim. Le gamin, devant la mine de Stéphane la veille lui avait dit que demain il aurait quelqu’un pour le remplacer. Stéphane lui avait demandé pourquoi il gardait pas le boulot, ils pouvaient s’arranger, aménager ses horaires. C’est qu’il lui avait dit qu’il avait décroché une bourse d’excellence. Pour Sciences Po Paris. Évidemment le champagne avait sauté et Ibrahim y avait trempé les lèvres avec une moue de travers trop respectueux qu’il était pour vexer Stéphane. Stéphane, au fond, le savait. Ce gamin avait quelque chose de spécial. Depuis le premier jour en passant par le camp de réfugié l’aventure mars 2030, il avait toujours vu, entendu et constaté une grande sagesse chez ce gosse. Alors c’était mérité. Stéphane le regarda comme il était plongé sur son portable. Et dire que c’était lui qui avait battu le rappel au point qu’ils soient tous les trois dépassés par son succès. - Bon, on fait le point ? - Tu veux choisir ce soir ?!? - Non, Rose, je veux pas choisir ce soir mais un petit débrief à chaud peut être que ça nous aidera à faire un premier tri. - Bonne idée boss. Ibrahim fit glisser sa chaise de l’autre côté du bureau/caisse pour faire face à Rose (déjà dans ses notes) et Stéphane ( toujours en train de boire sa bière). - Bon déjà le dernier… Romain Lathus, c’est mort et le premier aussi. On est tous d’accord. - Non. Le premier il m’a plu. - Tu t’en souviens ?!? - Oui. Un mec bien qui cherche un temps plein qui a de l’expérience dans le travail en supermarché et en alimentaire. - Comment il s’appelle celui là ? - Jean Romagné. - Non. - Pourquoi patron ? - Parce qu’il a la mentalité de PoitouDiffusion. - Qu’est ce que tu veux dire par là ? - Ce que je veux dire, Rose c’est que je t’ai déjà toi pour faire du profit mais je ne suis que l’arabe du coin, faire du profit n’est pas mon objectif enfin pas comme Géant ou Super U - Mais arrêtes de me prendre pour une méchante ! - Non, tu est ma super vilaine préférée. - Arrêtes les comics gamin. On parle de l’avenir de ton bouclard. - Vous préféreriez quelqu’un avec de l’expérience mais aussi, un certain savoir être. Pas un sourire éclatant et une mentalité de requin mais un sourire discret et une poignet de main franche en somme. - T’es trop fort ! - Alors prenez lui. - Qui ? - Celui qu’on a reçu après manger. Eric Picard.
Robin des banques - 6
L’ANTIDOTE
>>
<<
Depuis 2017
O2
+
+
+