Carole Monti ne rigolait pas. Ni maintenant. Ni à aucun moment. Elle ne parlait pas non plus. Pas beaucoup. Même si Saurier avait tenté de montrer sa connivence elle lui avait répondu avec un geste les invitant tous à s’asseoir face à elle. Noé comprit rapidement qu’elle étudiait son projet. Ce devait être cela la vie d’un ministre de la République. Prendre les choses quand elles arrivent. Et décider avec un sang froid qui transpirait de chacune de ses attitudes. Des animaux au sang froid. Des serpents. Prêts à vous mordre si jamais ce que vous proposez ne collait pas avec leur plans. Ils restèrent au moins cinq minutes à attendre. Saurier les modérant de signes d’apaisement qui indiquait que tout était normal. Et que tout allait bien se passer. - Alors comme ça votre banque ne sera jamais une banque d’affaires, Julien ? Vous savez pourtant à quel point notre pays en a besoin. - Je sais, Madame la Secrétaire, mais nous avons trouvé un moyen de faire croître les PME et de faire investir les petits épargnants dans des projets un peu plus risqué. - Oui, j’ai lu tout ça. Lequel d’entre vous est Ouédraougo ? - Moi, Madame la Secrétaire. - Appelez moi Carole M. Ouedraougo. Votre idée vaut plus que ce que ses branleurs des écoles de commerces dont votre patron a pu nous produire depuis qu’ils ont acheté un porsche à nos frais. - Karine, je me doi… - Vous c’est Mme la Secrétaire, Saurier. D’ailleurs, je vois des dates qui remontent à deux années sur les documents. Comment vous expliquez ça tous les deux ? Jean Claude Rabotin, c’est bien ça ? Et vous Saurier ? Alors, pourquoi tant de délai ? Rabotin crut bon de se saisir l’appel de son nom pour faire valoir son point de vue. Un point de vue préfabriqué qu’ils avaient mis au point avec Noé pendant le trajet en train. Rabotin avait accepté la mobilisation des ressources du Crédit Populaire pour ce projet à condition qu’il n’entrave pas le projet de Julien Saurier et de l’autoentrepreneuriat qu’il proposait pour les déserts bancaires qui étaient aussi une idée porteuse pour une région rurale comme la Nouvelle Aquitaine. - Ben Bien sûr. Une idée porteuse. Précariser encore un peu plus un pan de la société française. Au profit de ses enculés des iles Caiman. Je suis sûre que vous croyiez bien faire en plus Rabotin, non ? - C’est que nous avons déjà des entrepreneurs autonomes dans certains secteurs des Landes, du Béarn ou de Creuse et il faut dire qu’il s’en sortent plutôt bien. - Plutôt bien ? Monti replongea dans le tas de dossiers qui occupait son bureau les feuilletant comme on cherche la page d’un livre et s’arrêtant de la même manière sur un dossier à chemise jaune qu’elle ouvrit en commençant à faire défiler les feuillets jusqu’à s’arrêter à ce qu’elle, visiblement, recherchait. - 50 autoentrepreneurs. 25 reconversions. 10 demandes de rattachements. 5 Demandes de fonds de soutien. Et 5 voraces. C’est cela que vous appelez « plutôt » bien M. Rabotin ? - Oui, c’est-à-dire que nous en sommes à trouver la bonne formule mais… - Ouédraougo, combien de fond levés ? - 500 000 € - En combien de temps ? - 8 jours. - Combien d’entreprises financées ? - Sur le quartier des Couronneries, 75. - Vous voyez Saurier ? C’est ça l’avenir de votre banque. On est pas aux États Unis. Ici la richesse se construit par 10 employés maximum. Vous allez m’étendre le dispositif à toute la France. Je n’ai rien à rajouter.
Robin des banques - 8
L’ANTIDOTE
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