Ce fut un véritable chemin de croix avant que Noé ne se retrouve dans le bureau du commissaire. Comme s’il n’avait pas vraiment envie de le voir. Noé avait raté deux conférences en ligne expliquant à Caroline qu’il était indisponible pour raisons impérieuses. La première fois c’était passé crème. La deuxième un peu moins. Surtout qu’il lui avait dit qu’il serait là. - Rien de grave M. Ouédraougo ? - Non. non, juste une affaire urgente à régler. Vous comprenez ? - Je vous fais confiance. Mais sachez que M. Rabotin vous demandera sans aucun doute des comptes. - Une fois de plus. Merci Caroline. - Faites attention à vous. - Merci. Il était 17h30 bien sonné lorsque le boiteux lui fit signe d’avancer vers le bureau du commissaire. Quand il entra dans le bureau, il fut saisi par l’odeur âcre de la transpiration. De toute évidence le commissaire Monchaud marinait dans cet état depuis plusieurs heures, voire plusieurs jours. Il tournait et virait derrière son bureau lorsque Noé referma la porte sans prêter attention à lui. Il était sur le web via son portable. Et Noé n’eut aucune peine à deviner qu’il était sur le site de la Nouvelle Presse du Centre vu son état d’agacement. Il finit par lever les yeux de son portable qu’il balança sur son bureau et ne tourna pas autour du pot. - C’est vous qui êtes derrière tout ça ? - Hein ?!? - Allez, arrêtez vos conneries Ouedraougo, vous et deux potes avez fait fuité un document couvert par le secret de l’instruction. - Mais, enfin, de quoi vous parlez ? Je viens juste vous livrer des informations. - Que vous avez auparavant livrées à la presse. Ce fut au tour de Noé de se renfrogner. Bordel de cul, il n’avait jamais trahi qui que ce soit pour une feuille de chou et ce qu’il s’apprêtait à dire au commissaire aurait des effets dévastateurs sur son avenir et celui de sa banque si jamais ils venaient à fuiter dans la presse. Alors il déplia son double mêtre et posa ses poings sur le bureau du commissaire. Celui ci eut un mouvement de recul incontrôlé. Il était sur les nerfs de toute évidence. Noé choisit alors d’apaiser les choses. C’était sa meilleure chance de se faire entendre. Il leva les mains en signe d’apaisement et s’assit dans le fauteuil face au commissaire. - On est pas des balances commissaire. Si on est venu vous voir. C’est qu’on est autant dans la merde que vous. - Comment pourriez vous être plus dans la merde que moi ? Je me retrouve pris entre ma hiérarchie qui me demande de fermer les yeux et de classer un dossier plus long qu’il ne l’est et la presse qui le rend public. Dites moi, qui est le plus dans la merde ? - Vous. C’est évident. - Et vous pouvez m’aider ? - Non. - Bordel… Qu’est ce que vous foutez là alors ? - Je vous demande juste, pour que personne ne soit éclaboussé, de clore l’affaire. Comme il se doit. En suivant le pognon jusqu’au bout. Jusqu’à la naissance de cette histoire. - Putain de quel fric vous me parlez ? - Vous le savez très bien. Des types de Saint Eloi ont été payés pour immoler un haut fonctionnaire de la mairie qui venait d’être mis au placard pour son opposition à l’ouverture des pistes cyclables sur la rocade et qu’il a tué un homme à cause de cela. - C’était un accident. - Oui. Un accident qui faisait tâche. Pour plusieurs raisons. Et vous le savez. Stéphane et Karim vous l’ont dit. - Vous voudriez que je mette à jour un assassinat prémédité par la maire elle même pour asseoir sa politique écologiste. Au prix de la corruption de petites frappes qui se sont laissées griser ? - Exactement commissaire. Exactement. Parce que je suis en possession de billets qui n’ont rien à faire dans ma banque. Parce Stéphane a été menacé dans son bouclard, arme au poing. Parce que le pauvre cyclise mérite la vérité. Parce que tout le monde mérite la vérité. - Vous savez qu’elle niera. Vous savez qu’elle accusera un autre fusible ? - Cela dépend de vous commissaire. Uniquement de vous.
Un voie pour des voix - 16
L’ANTIDOTE
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