Le compte bancaire que Noé devait pirater était celui d'une femme. Selon le commissaire, elle était impliquée de façon importante dans le trafic de stupéfiant sur Poitiers et la région. Le commissaire Bouchet lui avait expliqué qu'elle servait à la fois d'entrepôt et de compte de sécurité. Quand il lui avait demandé de quoi il s'agissait, il lui avait simplement dit de comprendre cela comme le fonds de roulement d'une société et son avance en trésorerie. Si bien qu'il était possible de pouvoir prévoir, à partir de ces mouvements bancaires, l'arrivée et le stockage probable de stupéfiants à son domicile. Noé n'avait pas mis longtemps à saisir que si le compte était approvisionné, cela voudrait dire que les gens qui achetaient la drogue avaient payé et qu'elle allait sous peu à son tour acheter. Le commissaire lui avait dit qu'entre le moment la drogue qui se trouvait chez elle était revendue et le moment l'argent était crédité sur son compte, 10% de la somme versée restait sur son compte. Ce qu'il n'avait pas mis longtemps à saisir également c'était qu'il allait devoir surveiller ce compte sur une période plus longue qu'une simple consultation. Quand il s'en était ouvert au commissaire, Bouchet lui avait dit que si lui prenait des risques sur un peu plus d'un mois depuis son bureau et avec la protection des forces de police, des gens bien plus exposés que lui sur une période bien plus importante allaient permettre de faire tomber un réseau de grande ampleur. Le ton sec et le visage tiré du commissaire lui fit comprendre qu'il s’agissait de fait d'une proposition qu'il ne pouvait refuser. Il avait alors serré la main du commissaire sans entrevoir ses hypothétiques origines. Maintenant qu'il se retrouvait dans son bureau avant le briefing de la semaine, cela lui semblait presque inévitable. Le commissaire se servait de lui pour arriver à ses fins, sachant très bien qu'il ne pouvait refuser eu égard à la manière dont il avait fermé les yeux sur les agissements de Stéphane. Et il ne doutait pas que si l'information venait à se savoir au sein du Crédit Populaire, Bouchet nierait toute implication. Il relut une dernière fois les passages du code de déontologie de la banque concernant la consultation des comptes bancaires et n'y vit aucun salut. Toute consultation effectuée hors des cas de découvert non autorisé ou de demande de crédit par un particulier par son conseiller était coupable de sanctions administratives majeures voire de poursuite pénales en cas de malversations. S'il agissait, il serait donc sans filet de ce côté là aussi. Il repoussa avec ses pieds son fauteuil et se leva pour saisir son ballon. Les yeux perdus, il le faisait tourner entre ses mains, attendant un signe qui lui permettrait de prendre la bonne décision. Dehors, le jour s'éteignait, teintant de rouge et de rose la façade nettoyée de l'immeuble d'en face. En bas, les cris des enfants rentrant de l'école parvenait assourdis jusqu'à lui. Il pensa bizarrement à ses deux filles. Karine devait être avec elles dans le flot de parents deux étages plus bas. Il comprit alors que ce qu'on lui demandait, au delà de mettre en danger son confort était de prendre position en quelque sorte. En voyant les enfants parcourir les rues de toute leur innocence, il pensa à ses filles et à ce que l'avenir leur réservait. Tout comme aux moyens qu'il avait de préserver leur innocence et leur vie. Il sut alors avec netteté ce qu'il avait à faire. Son ballon posé, il se connecta au serveur du crédit populaire et entra le nom de Sarah Azuelo.
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L’ANTIDOTE
La gueule du loup
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