Stéphane avait presque l'impression d'être le dernier homme sur terre. La voie rapide, bruyante la journée, ne vibraient que de façon erratique au passage des voitures. Face à lui, les lampadaires donnaient à voir les contours des entrepôts de la Zone Industrielle de la République II. Quelques camions commençaient à entrer à reculons pour embarquer les marchandises à livrer. Hormis cela, seul le bruissement des herbes folles lui donnait à penser qu'il n'était pas mort. Quand il avait contacté Bouchet, le ton était vite monté jusqu'à ce qu'il lui parle de Thomas Virandier. A l'évocation de ce nom, le commissaire se montra particulièrement intéressé au point qu'il se disait prêt à l'aider. Mais à une condition. Quand Bouchet lui avait dit ce qu'elle recouvrait, il avait su qu'il ne pouvait faire autrement que d’accepter, sans avoir la moindre certitude que ce qu'il lui demandait ne se retourne pas contre lui. Ainsi avait il contacté Virandier avec un sentiment désagréable d'avoir un couteau sous la gorge. Lorsqu'il avait rencontré Virandier quelques heures plus tard, le visage fatigué et les traits tirés de l'homme l'avait complètement affolé. Il fut presque soulagé d'apprendre que son état n'était en rien à trop de cocaïne mais à la mort de son beau père tout comme il avait été profondément désolé de son attitude chez lui. Stéphane n'en crut pas un traître mot et quand il lui expliqua les raisons de son appel quelques heures plus tôt, il espéra que Virandier serait moins méfiant que lui. Ainsi il lui expliqua que sa démarche louable avait su lui apporter la quiétude relative d'une activité indépendante mais force était de constater qu'aucun assureur n'était en mesure de protéger ce qu'il avait. Ce genre de commerce n'était pas pour autant exempt de convoitise et, il devait bien se rendre à l'évidence que seuls des gens comme lui, Virandier, pouvait lui fournir l'ombre protectrice qui lui avait manqué ses derniers mois. Virandier en fut flatté et conclut qu'il faisait là le bon choix. Ainsi se serrèrent ils la main sur une opération le soir même qui permettrait à Stéphane de rencontrer ses nouveaux associés et aussi de reprendre son commerce, cette fois ci mieux armé pour le défendre. Dans l'après midi il avait rassemblé les fonds avec l'aide de Bouchet. Puis il patienta dans une salle de cinéma avant que la nuit ne tombe. , il avait chargé son sac de sport, enfourché son VTT et pris le temps de repérer les alentours du lieu de rendez vous. C’était une station service désaffectée prospérait dorénavant toutes ce que le climat poitevin autorisait comme herbes folles, ronces et autres orties. Les murs, tagués de haut en bas, se fissuraient pour la plupart et ceux qui portaient la structure restante commençaient même à s'effriter. Cela devait faire plusieurs dizaines d'années que les pompes avaient été démantelés. Seul restait le sable noir et sec qui marquait leur ancien emplacement. Stéphane vit tout de suite que ce qui avait été le corps de bâtiment de la station ne comportait maintenant plus qu'une unique porte d'entrée. Celle de l'arrière boutique ayant été muré, de toute évidence à plusieurs années d'intervalle. Ceux qui laissaient entrer, pouvaient aussi s'autoriser à ne jamais vous faire sortir, pensa t il. Il repéra néanmoins une lucarne à 3 mètres de hauteur à laquelle il réussit à se suspendre et à la force de ses bras franchir pour retomber dans la broussaille encore plus dense qui séparait la station des premières habitations du quartier de la Demi Lune. Depuis, il avait récupéré son vélo et était entré par la porte principale, le silence régnait, s'installant de plus en plus au fur et à mesure que la nuit avançait. Quand, à l'heure exacte du rendez vous il entendit une grosse cylindrée froisser les cailloux pour venir se garer en marche arrière et tout feux éteints devant la station, il fut presque rassuré. Il vit Virandier sortir accompagné de deux hommes dans leurs âges vêtus de noir de la tête aux pieds. Il alla à leur rencontre et dut se contenter d'un signe de tête de leur part en réponse à son bonsoir. Ce fut Virandier qui sortit deux sac de supermarché du coffre de l'audi et entraîna le groupe vers l'intérieur de la station. A l'abri des regards, il prit le temps de montrer les 40 kilos de résine de cannabis qui faisait l'objet de leur transaction. Le cœur de Stéphane s'emballa alors légèrement. Son visage dut se décomposer aussi quelque peu et Virandier sentit le besoin d'une explication. - Ne t'inquiète pas, c'est le même prix - Peut être mais je suis en VTT et, enfin, je sais pas comment je vais écouler tout ça, ma clientèle est disons, moins friande de ce produit que la vôtre - Ne vois pas les choses comme ça, disons que c'est une mise de fond de notre part. - Une mise de fond ? - Ecoute, on s'est expliqué tout à l'heure et j'ai repensé à ta situation. T'es un type réglo et mon attitude chez toi...tu sais à quoi elle est dûe...Disons que ce sont des excuses et une promesse - Une promesse ? - Celle d'un partenariat durable. Stéphane fut presque satisfait d'entendre le premier coup de feu retentir avant d'avoir à leur serrer la main. Le bruit, fut aussitôt suivi d'un jet de sang et de l'affaissement du premier porteur de cabas. Sans réfléchir alors que des lampes à sodium les rendirent instantanément aveugles, Stéphane courut jusqu'à la lucarne. Alors que le cadavre du deuxième homme de main de Virandier s'écroulait sur le sol, il basculait de l'autre côté de la station. Il entendit ensuite Virandier hurler de ne pas tirer et qu'il se rendait. Au moment il touchait le sol il entendit le bruit des bottes du groupe d'intervention pénétrer dans la station. Il avait commencé à courir quand il sentit la chaleur des lampes disparaître dans son dos. Le temps que ses yeux s'acclimatent à nouveau à la pénombre et qu'il tourne à nouveau la tête vers l'avant, une douleur violente vrilla les muscles de son mollet droit et il s'écroula. Furieux, il pivota sur le côté et hurla : - Putain, je suis avec vous ! La seule réponse qu'il reçut fut une deuxième balle dans la cuisse. Il hurla de plus belle, rampant comme il pouvait jusqu'à ce qu'une poigne rude le retourne et l'oblige à faire face à son agresseur.
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L’ANTIDOTE
La gueule du loup
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