L'après midi avait filé à la vitesse de la lumière. Stéphane avait retrouvé Noé et Karim sur le terrain du Jardin des Plantes ils avaient enchaînés plusieurs matchs rugueux et engagés. C'était à regret qu'il avait les quitter vers 17h30 pour rejoindre un client à son appartement. Dans le bus, il ressentit enfin la fatigue et ses jambes lui parurent aussi lourdes que cotonneuses. Il avait réussi à arrêter le saignement de son coude, trace d'une chute sur le béton après une bataille pour un ballon perdu. Il avait le sourire rien qu'à repenser à cette session. Et pour la première fois depuis sa sortie de l’hôpital il ne ressentait aucune douleur thoracique. Il était heureux. Le bus le déposa à son arrêt habituel et il regagna sa résidence en hâtant le pas, pressé de régler la transaction. Il se demandait combien de temps lui prendrait le deal et s'il était envisageable qu'il retrouvent ses amis dans moins d'une heure. Quand il les avait quitté, ils avaient pris un gamin pour continuer à jouer et il ne doutait pas que les ballons de basket résonneraient sur les terrains jusqu'à la nuit. Il regarda sa montre et constata qu'il avait cinq minutes de retard. C'était une bonne chose. Celui qui venait lui acheter la beuh était toujours ponctuel et taiseux. Il se dit alors que d'ici une demi heure il pouvait être de retour au Jardin ; ce qui lui laissait encore deux bonnes heures de jeu à venir compte tenu du beau temps. Il vit le type attendre devant la grille de sa résidence comme il enlevait ses écouteurs. Il le salua et l'autre vint à sa rencontre. Ils échangèrent rapidement une poignée de mains et Stéphane ouvrit la marche jusqu'à son appartement. Les différentes portes ouvertes, il appela l'ascenseur et attendirent en échangeant deux ou trois banalités sans importance. Dans l'ascenseur, Nicolas consulta sa montre. Prenant les devants, Stéphane lui dit que son colis était prêt, si bien qu'avant même sa remise il était déjà en possession de son prix. Dans un quart d'heure il serait de nouveau au Jardin pensa t il. Il perdirent un peu de temps dans le couloir. Les ampoules ayant grillées, Stéphane dut utiliser la lumière de son smartphone pour arriver jusqu'à sa porte. C'est au moment de sortir ses clés qu'il comprit que quelque chose n'allait pas. La pénombre dans laquelle ils étaient se trouvait transpercée par une raie verticale émanant de son appartement. Quand il poussa la porte dont la serrure était déchiquetée, il n'alla pas plus loin. Nicolas fit un pas en arrière lorsqu'il tendit le bras pour l'écarter. Tendant l'oreille il ne perçut aucun son provenant de l'appartement. Tout ce qu'il avait réussi à oublier depuis midi lui revint comme un boomerang. Il sentit presque l'haleine chargé d'alcool et de beuh de l'abruti qu'il avait l'expulser de chez lui et ses menaces lui parurent bien plus denses que l'air nauséabond qui s'échappait de son appartement. Une fois son client éconduit, il se résolut à faire face. Et à prendre note. Sa colère commençait déjà à brûler lorsqu'il poussa la porte d'entrée. Celle-ci était recouverte de graffitis obscènes dessinés à la bombe. Des coulures vertes donnaient une allure de vomi à ses murs. La salle de vie était ravagée. Son canapé et son fauteuil étaient éventrés et sa télévision encastrée dans sa table de salon. Une odeur de pisse vrillait l’atmosphère de la kitchenette et quand il se tourna vers la baie vitrée, il vit sur les vitres le mot mouchard écrit maladroitement à la bombe. Quand il entra dans sa chambre, l'odeur de pisse y était encore plus présente. Son matelas éventré était jaune urine. Et ses placards avaient été dévalisés. Aucun de ses pieds ne restaient et les stocks de la récolte précédente avaient aussi disparus. Les vêtements étaient par terre et il ne retrouva pas non plus le sac de sport avec la recette de ses deux derniers mois. Il alla ensuite sur son balcon après avoir ouvert toutes les fenêtres de l'appartement. Après avoir pris une profonde inspiration, il se retourna et contempla l'étendue des dégâts. Seule sa table à manger était sauve ainsi que les murs de la salle de vie. Le reste allait demander beaucoup d'argent, de temps et de produits désinfectant pour revenir à la normal. Tout comme de nouvelles plantations allaient réclamer un investissement important. Il s'aperçut alors qu'il avait toujours à la main les cinquante euros de son client. Il se dirigea jusqu'à la porte d'entrée, remettant au passage les chaises à l'endroit et écartant la garniture de son canapé et ferma la porte avec une chaise. Il s'assit dessus sans pouvoir dégager son regard du tag dégueulasse ornant la baie vitrée. Il prit alors son portable et composa le numéro qui figurait au dos de la carte que le commissaire Bouchet lui avait remis.
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L’ANTIDOTE
La gueule du loup
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