L'appartementdeStéphanesonnaitétrangementvidelorsqu'ilenpoussa enfinlaporte,plusdetroissemainesaprèsl'opérationquil'avait vurevenird'entrelesmorts.Depuistoutcetempsils'étaitpresque habituéaubrouhahaincessantdel’hôpital.Desmachines,lesscopes avaientilsapprisqu'ellessenommaient,aubruitfeutrédes soignantsenpassantparlafoliepassagèreouterminaldesautres patients,lesilenceétaitplusoumoinsdevenuunconceptabstrait pour lui. Lorsqu'ilposasonsacdesportcontenantsesaffairessurson fauteuilets'affaissaàsontourdanssoncanapé,ilressentit, malgrélesantalgiques,unedouleurencoreviveauniveaudesonbas flanc,làoù,Karimàforcedevouloirlegarderenvieluiavait fracturétroiscôtes.Ilseredressaetadoptaunepositionquile faisaitmoinssouffrireteutl'impressiondesoufflerpourla premièrefoisdepuisqu'ilavaitperduconnaissanceaprèsqueBigO aittirésurlui.Ilregardaparlafenêtredelapièceetvitquele soleiltentaitunetimidepercéeentrelesépaisnuagesdecedébutde novembre.Etsanstropsavoirpourquoiilsemitàrire.Lefaitdese retrouverchezluisansdoute,enfinaucalme.Lefaitd'êtreencore en vie plus certainement. Unbruitsemblableàuncoupdefusilémanantdesacuisinelefit sursauteretchangeasonsourireenrictusdedouleur.Ilseleva péniblementetattrapasonballondebasket,prêtàlelancersur celui qui l'attendait. Quandilvitsesdeuxamisinterloquésparsonvisagesévèreetla bouteilledanslesmainsdeKarim,lechampagnecommençantàcouler sursesdoigtssansqu'ilneréagisse,lesourireluirevintetil lâcha son ballon.KarimconfiaaussitôtlabouteilledechampagneàNoépourépauler Stéphane et l'aider à s’asseoir dans son fauteuil.Envoyantsesdeuxpotesfaceàlui,cefutl'enviedepleurerqui enserrasagorge.Ilétaittropfierpourledire,maisilsavait qu'illeurdevaitlavie.Cesmontagnesrussesémotionnelsétaientson quotidiendepuisqu'ilavaitreprispiedparmilesvivants.La psychologuequ'ilavaitrencontrélorsdesonséjour,luiavaitdit quec'étaitnormal.C'étaitliéàcequ'ilavaittraversé.Unesorte desyndromeposttraumatiqueavaitilcompris.Elleluiavaitditque cela s'arrangerait au fils des semaines. Il l'espérait. IlselevapourmasquersontroubleàKarimetramena3verresen plastiquepourservirlechampagne.Sursatablebasse,Karimavait poussédecôtélesrestesdesondernierrepasici.Ilyavaitencore lestockd'herbedontils'étaitservipourBigOetsonverrede tipunchoùlesucredecanneavaitséché.Uninstantilrevitsonami au moment où il avait tiré. Son regard désespéré.KarimetNoéluiavaientexpliquécommentilavaitfini.Abattuparla policedansunviragedelaroutedeMontamiséalorsqu'ils'entêtait encore à leur échapper. Noéluiavaitracontéqu'ilavaitrésistéjusqu'aubout.Après l'accidentqu'ilavaitsubipuisprovoqué,ilavaitfrappélepolicier quitentaitdesortirdela308,poussantl'inspecteurChavetàouvrir lefeuquandilavaittentédel'étrangler.Ilyaunmois,ilaurait étéfierdelui.Ilauraitpenséqu'iln'avaitpasbaissélesbras. Qu'il avait lutté jusqu'au bout.Aujourd'hui,ilnesavaitpasquoienpenser.Iln'arrêtaitpasde repenseràlalueurdanssonregardavantqu'ilnetiresurlui.Acet appelausecoursarrivétroptardivement.Etilruminaittoutesles foisoùilavaiteul'occasiond'évoquerleurvieaveclui.Toutesles foisoùilsavaientétésincères.Ettouteslesfoisouplutôtquede rire,ilsauraientdûpleurer.Dorénavantilététroptardpourl'un comme pour l'autre.Ilrespiraàfondetcontemplasesamis.Ilsluiparlaientdepuis quelquesinstants,intarissablesurl'aventureextraordinairequ'ils venaient de vivre.Karimracontaitcommentsescôtesavaientcédéfacilementsoussa force, Noé tâtant ses biceps avec dédain.Stéphanefinitparleversonverrecommepoursignifierqu'elles étaient toujours solide en fin de compte.