- Donc tout ce que vous avez foutu, c'est baiser ? Karim regardait l'espèce de cow boy qui l'avait accueilli au commissariat central sans trop comprendre ce qu'il lui disait. Et ce depuis le début. La dernière question n'ayant pas plus de cohérence avec ce qu'il s'était imaginé que le reste de sa vie depuis son altercation avec Solène, il y a moins de 24 heures au Palais de Justice. Il ne comprenait pas. Il ne comprenait rien. Et même maintenant qu'il était sobre, il ne savait pas pourquoi l'inspecteur lui avait enlevé les menottes, lui avait demandé s'il voulait un café ce qu'il avait accepté, rapport à sa gueule de bois - , lui posait toutes ses questions sur Solène et lui. Leur relation. Leurs rapports. Et son emploi du temps. A chaque fois, il avait l'impression de répondre à côté de la plaque. Pourta nt il ne faisait que dire la vérité. La réalité. La réalité d'une relation mal commencée et qui s'annonçait comme devoir mal se finir. Mais au moins il avait les mains libres. Et un café pour lutter contre l'agressivité presque palpable de l'inspecteur devant lui avec le secret espoir d'en comprendre la raison. Il dit donc une nouvelle fois la vérité. - Ben, un peu ouais. - Ben un peu ouais ?!? Tout ce que vous dites M. Jaïsh est filmé et enregistré. A des fins de témoignages pouvant être présentés devant les plus hautes instances de la Justice de la République. Soyez précis. Très précis. Vous voulez un autre café ? - Oui. Oui je veux bien un autre café. Tout portait sur la deuxième nuit qu'il avait passée avec Solène. C'était le policier qui lui avait dévoilé la date et le jour de cette rencontre. Le jeudi 18 novembre de cette année. Vers 23 heures. Mais ça n'était pas ce qui l'intéressait. Ce qui l'intéressait c'était passé après. Après qu'ils eurent quitté le 16. Vers minuit. Et il voulait, il venait de lui dire, des informations précises. Or, Karim était bien incapable de lui fournir. Il se souvenait juste du nom du bar. C'était le flic qui lui avait donné la date et l'heure. Alors comment faire ? Il était maintenant seul dans la salle d'interrogatoire. Le policier était vraiment parti lui chercher un café. Incroyable. Il n'avait pas résisté quand ils lui avaient passé les menottes comme il avait cru dur comme fer finir en cellule de dégrisement avec une plainte pour outrage à magistrat. C'était cela qu'il avait mis derrière la connerie que lui reprochait Solène. Aucunement leur rencontre. Leur première rencontre. L'inspecteur rentra comme il lui semblait que le brouillard se dissipait autour de lui. - Alors ? Qu'avez vous fait après minuit dans la nuit du 18 au 19 novembre ? - On a passé la nuit ensemble. Toute la nuit. Jusque tôt le matin. Je ne sais pas à quelle heure elle est partie mais quand je me suis réveillé pour prendre mon service, vers 10 heures du matin, elle n'était plus là. Ce dont je me souviens parfaitement par contre, c'est qu'elle avait laissé mon vélo. - Et donc ? Cela veut dire qu'elle ne vous a pas quitté de la nuit ? - Non. Ça , c'est à vous de le voir. Parce que c'est elle qui nous a ramené. Une audi A3. Noire. Il y a une caméra de surveillance en aval de ma résidence au niveau du viaduc. Ça devrait pas être difficile de savoir si elle a bougé. - OK. Prenez le temps de finir votre café. L'inspecteur ressortit de la salle comme il y était entré, sans fermer derrière lui. C'était maintenant qu'il devait se barrer. Prendre la tangente. Le flic voulait un alibi. Et il venait de lui donner le moyen de le torpiller. Parce qu'il se souvenait. Il se souvenait exactement. Et ce qui s'était passé le torpillerait lui aussi. Il le savait. Il devait partir. Au moment il s'apprêtait à franchir la porte, l'inspecteur lui fit face. Presque tête contre tête. Karim baissa la tête et retourna s’asseoir. En signe de bonne volonté, il tendit ses poignets et prononça ce qu'il croyait devoir dire. - Allez y, c'est bon. Je tiens à dire que je n'ai consommé qu'une seule fois - Allons, allons, remballez moi ça, M. Jaïsh. Vous êtes libre. Merci pour votre coopération. Comme depuis le début, il ne comprenait pas plus ce qu'il venait de lui dire. Pas complètement. Suffisamment néanmoins pour qu'il ne se fasse pas prier et oublie ce qui s'était passé cette nuit là.
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L’ANTIDOTE
Un regard sur la nuit
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