Emmitouflé dans une couverture de survie, Noé n'arrivait pas à relever la tête. Tout autour de lui, les sirènes de la police résonnaient toujours. Tout juste arrivait il encore à tenir la compresse qu'un infirmier lui avait donné pour stopper le sang qui s'écoulait de son cuir chevelu. Autour de l'aéro club, c'était l'effervescence. Un nombre important de voyageurs, bloqués à Poitiers regardaient ce qui se passait en retrait de l’aéroport poitevin. Certains prenaient même des photos. Devant cet afflux, de nouvelles voitures de police arrivèrent pour établir un périmètre de sécurité encore plus éloigné du tarmac que ne l'étaient les grillages entourant les hangars de l'aéro club Noé , Herbelin et son avion avaient été retranchés. L'avion à quelques mètres de lui sentait encore le chaud. A peine 30 secondes après que Herbelin lui ait tout avoué, et qu'il eut tenté en vain de s'extraire de la carlingue, des herses dressés en aval de leur route par des policiers formant un barrage surarmé avaient eu raison de l'arrogance du millionnaire. Les pneus n'avaient pas éclaté mais son cuir chevelu, si. Voyant les herses, Herbelin avait donné un embardée si vive pour le bi moteur que le train arrière gauche s'était soulevé projetant Noé sur l'angle vif du cockpit. Empêtré dans le massif herbeux qui le conduisait vers la piste de l'aéroport, Herbelin tenta une dernière manœuvre mais les tirs répétés à défaut d'être précis du barrage policier achevèrent la course désespérée de l'avion. Il se stoppa à quelques mètres seulement du tarmac. La police fut sur eux avant même que Herbelin ou Noé aient le temps de s'extirper. Herbelin et Noé furent descendu manu militari et menotté avant d'être entraîné à l'abri des regards dans les locaux de l'aéro club transformé en salle d'interrogatoire. La surprise fut alors totale pour Noé. S'il avait mis sur le compte de la précipitation son arrestation musclée, il tomba des nus lorsqu'on lui demanda quel poste il occupait au sein de l'entreprise de François Herbelin. Il lui rirent au nez quand il leur dit ce qu'il faisait. Ces rires devinrent soupçons quand il leur exposa les raisons de sa présence aux côtés du millionnaire. Au final ils prirent sa déposition, lui retirèrent les menottes et lui donnèrent une compresse pour son crâne en le remerciant pour sa coopération. L'espace d'un instant, Noé crut qu'ils allaient le rappeler et il resta debout non loin des algeco de l'aéro club, espérant à chaque sortie voir quelqu'un revenir vers lui et écouter tout ce qu'il avait à dire. Une bonne demi heure passa et le jour commençait à s'éteindre quand il se résolut à ne pas compter sur eux pour ce soir. Il alla demander un pansement neuf au SAMU et se dirigea vers la sortie. Quand il arriva devant les policiers en faction qui protégeaient toute la scène, il dut attendre qu'ils reçoivent le feu vert. Il ne vint pas. Avec le sourire mais fermement les policiers lui dirent que les inspecteurs en charge de l'enquête comptaient encore l'interroger. Il se trouva donc une vieille souche d'arbre derrière les hangars d'avions, signala qu'il s'y rendait et composa le numéro de Karim il laissa un message lapidaire sur sa situation avant d'attendre qu'il le rappelle. Derrière les hangars, une brèche dans leur alignement lui donnait un angle de vue atypique sur le tarmac de l'aéroport. A cette heure de la journée, le soleil semblait comme s'éteindre sur lui et, bien qu'il eut certainement préféré être ailleurs, Noë trouva le spectacle du disque rougeoyant semblant comme fondre sur l'asphalte d'une beauté déplacée. L'inspecteur qui vint le retrouver, avec sa moustache gauloise et ses rangers de l'armée lui rappela que l'histoire n'en était pas encore à son crépuscule. Quand il tourna la tête pour suivre le bruit des réacteurs d'un Airbus, la carte postale qu'il avait cru voir avait déjà disparue, la verdure poitevine et les senteurs de kérosène ramenant le spectacle de cette fin de journée à sa stricte réalité. C'est quand il emboîta le pas de l'inspecteur Thévenet que son iphone vibra, il regarda le numéro comme le policier l'interrogeait, il lui expliqua et fut autorisé à prendre l'appel. A l'autre bout du fil, une cacophonie similaire à celle qu'il avait entendu quelques heures plus tôt accompagnaient les paroles presque inaudibles de Karim. Le si peu qu'il comprit avant que leur communication ne soit coupée, stoppa net Noé. L'inspecteur se montra plus impatient cette fois ci et lui prit le bras. - Désolé M. Ouedraougo, mais je n'ai pas la nuit, vous parlerez à vos potes demain, faites vous à cette idée et la nuit vous paraîtra moins longue. - Je crois que je ne leur parlerai plus. - Mais non, vous n'êtes accusé de rien, bien au contraire, je peux vous l'assurer. - Ce n'est pas ça. Thévenet lui lâcha le bras et sembla faire montre d'une grande magnanimité en ne lui en collant pas une. Il sembla presque crédible dans son effort d'empathie. - Qu'est ce que c'est, alors ? - Mon meilleur pote est entre la vie et la mort.
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