Il y avait bien un tunnel et au bout de ses ténèbres une lumière blanche, aveuglante. Sans qu'il n'en ait jamais pleinement conscience, Stéphane avait remonté aussi vite que son esprit le lui permettait ce tunnel, attiré comme un papillon par cette lumière si intense et amicale sans jamais réussir à l'atteindre ni même l'approcher. Par moment, il percevait des bruits qui venaient frapper contre le tunnel noir résonnant comme dans une caverne. Des voix connues. Des voix inconnues. Des voix qu'il lui semblait avoir appris à connaître. Sans qu'il ne puisse jamais faire le lien entre quoi que ce soit, il était ainsi resté plus de deux mois dans le coma en cherchant à enfin atteindre la lumière qui lui semblait si proche et si loin. Le matin du 5 juillet, il avait définitivement perdu une vision nette de cette lumière. Son corps l'avait supplanté et sa conscience était revenu l'habiter. Bien qu'il voulut bouger ses bras et ses jambes, elles ne lui répondirent pas. Lorsqu'il avait ouvert les yeux, le clair obscur de sa chambre lui parut irréel. Bouger les yeux lui fit mal. Comme de tourner la tête. Il reconnut pourtant sans le moindre doute la machinerie de l’hôpital. Puis lui revint ce qu'il venait de traverser. Il constata qu'aucun policier attendait devant sa porte. Il se demanda s'il était maintenant en sécurité. En un flash rouge sang, il revit le complice de Herbelin lui arracher les bandages et lui poignarder le flanc gauche et réentendit le bruit du coup de feu qui lui avait , finalement, sauvé la vie. Quand une infirmière entra dans son box, il ferma machinalement les yeux et mima son état précédent. Il fut surpris de reconnaître la voix de la jeune femme qui lui expliquait tout ce qu'elle faisait et allumait la télévision sur une rediffusion des finales NBA en lui disant que ses amis allaient venir le voir aujourd'hui. Sans s'en rendre compte, il dut réagir à une action du match car, l'infirmière lui prit la main et lui dit que c'était un beau panier. Puis le silence retomba et Stéphane n'eut pas la force de rouvrir les yeux avant de s'endormir. Il fut réveillé par le bruit d'une conversation qui semblait animée. Par réflexe, il tendit l'oreille et se força à garder les yeux et le corps aussi inerte qu'il lui était possible. Il reconnut aussitôt les voix de Karim et Noé. La conversation tournait autour d'un procès à venir. Celui d'un certain François Herbelin que l'on accusait d'évasion fiscale et surtout d'association de malfaiteur, d'assassinat et de tentative de meurtre. La gorge de Stéphane se noua à l'évocation du nom de son ancien client. Les scopes retranscrivirent le jet d'adrénaline que cela avait produit et la conversation cessa. Ses deux amis réagirent plus vite que la lumière. Il sentit la main de Karim lui prendre le pouls et entendit Noé appeler l'équipe soignante. Bientôt il reconnut les voix qu'il avait entendu pendant son état comateux qui égrainaient des questions et des réponses. Cela dut le rassurer car les scopes finirent par ne plus s'alarmer et il entendit la voix de celui qui devait être le médecin réanimateur parler d'activité réflexe. Le calme revint et ses amis un temps silencieux reprirent leur conversation. Sans pouvoir se l'expliquer, Stéphane préféra écouter plutôt que leur signaler qu'il était revenu. - Alors ? Il va s'en tirer ? - Oui. Les motards ont disparus. C'est notre parole contre la sienne. Sa fille et son ex femme nient tout. Trop à perdre, apparemment. - Et pour Stéph ? - Le type que t'as chopé à l'infirmerie de la prison faisait partie du même gang de motard que le tortionnaire de Stéphane. Ils ne porteront pas plainte. Trop à perdre. L'inspecteur m'a dit qu'ils avaient tout bonnement disparu. - Et pour le fric ? - Quel fric ? - Celui de herbelin. - Oh, le temps que tout soit tiré au clair il se sera refait. - On l'accuse de quoi déjà ? - Alors, ce gars a tellement mal vécu la crise qu'il a du se renflouer avec des activités illicites et en maquillant ses comptes. Et puis la richesse revenu un peu trop rapidement, il a blanchir son argent. Et pour cela rien de mieux que le Rocher. - Et tu bosses pour ça toi ? Noé soupira sans répondre. Karim prit cela pour ce que c'était. Un ras le bol. Ils gardèrent alors le silence, leur regard fatigué posé sur Stéphane. Dans son lit Stéphane se demandait combien de temps ils allaient rester là. Oui. Jusqu'où iraient leur patience à son égard ?
EPILOGUE
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L’ANTIDOTE
Le coût du sang
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