Karim avait à peine eu le temps d'entrer dans le service qu'il avait déjà la tête dans le guidon. Il n'avait eu que quelques heures pour venir pallier la défaillance d'une de ses collègues avant le service de nuit. Et le service était sur le qui vive. Dans l'espace central du service, l'agitation était de mise. Ses collègues avaient fait sauté les scellés du chariot d'urgence et l'interne débitait rapidement tous les éléments supplémentaires que son intervention allait réclamer. Dans le box 4, l'urgentiste était en sueur et il ne put s'empêcher d'apostropher vertement l'interne pour sa lenteur. Sans réfléchir, Karim le poussa sans ménagement et prit sa relève. L'homme inanimé était corpulent et chaque impulsion faisait remonter durement ses bras et malaxait sans ménagement ses omoplates. A la quinzième impulsion il constata que rien ne changeait. Le pouls n'était pas revenu et la respiration non plus. Il tourna la tête vers l'entrée du box et transmis l'information en reprenant le massage. L'infirmière et l'interne arrivèrent dans la seconde et éjectèrent Karim pour commencer l'intubation. L'interne voulut en savoir plus sur le patient mais l'urgentiste était déjà sorti du service. Karim revint avec le dossier et le bilan du SMUR. - Détresse respiratoire aiguë avec perte de connaissance. Il a été retrouvé par sa conjointe. Elle a d'abord cru qu'il était mort mais en appelant les pompiers, elle l'a entendu respirer. L'arrêt a eu lieu il y a 15 ... - Rien à foutre. Le motif  Karim écarta le dossier médical et parcourut le plus vite possible le bilan d'entrée réalisé par le SMUR et s'empressa d'énoncer le motif d'hospitalisation. - Probable surdosage de morphine - C'est-à-dire ? - Patient suivi pour lombalgie chronique suite à un AVP. Pas de dosage connu. - Putain ! Je m'en fous de ça ! Qu'est ce qu'il a ingéré ? Karim prit le jet d'adrénaline transpirant du ton du médecin comme une gifle personnelle. Il devait savoir que l'un devait être accompagné de l'autre. Il n'en vit trace dans les pages qu'il avait dans les mains. Il leva les yeux et vit que l'infirmière avait été obligée de basculer sur le lit pour maintenir la tête du patient dont les convulsions gênait le médecin dans la phase d'intubation. Il ramassa en hâte le dossier médical et chercha à toute vitesse les prescriptions dans les antécédents. - 15 mg par jour et 5 supplémentaire si besoin. Le SMUR signale que l'emballage de deux cachets de 20mg étaient sur le lit du patient mais ne précise pas l'heure des prises. L'infirmière était maintenant en train de brancher les différents scopes et plaçaient avec précision les électrodes aux points stratégiques du corps du patient. Très vite, les alarmes des scopes se turent et Karim constata que la manœuvre du médecin venait de ranimer le patient. Bien qu'encore agité de mouvements réflexe, son torse se soulevait à nouveau et le monitoring indiquait que son cœur battait à nouveau. L'interne avait le visage en sueur et regardait Karim avec intensité. - Tu sais où on range la naloxone  ? - Oui. - 2 ampoules de 0,4, vite s'il te plait Karim courut jusqu'aux armoires à pharmacie dans le carré central et prit les clés du tiroir à stupéfiants. En commençant à ouvrir le tiroir, il regarda le nom médicamenteux de la naloxone et en prit deux ampoules de 0,4 mg dès qu'il se fut assuré de ne pas se tromper. Il laissa le tiroir tel quel et dut demander à la famille d'un patient de bien vouloir ressortir du service alors qu'elle venait de passer les portes de celui ci sans préciser quoi que ce soit. Déjà le scopes mesurant la fréquence respiratoire du patient donnait l'alarme. Karim tendit les ampoules à l'infirmière et se plaça du côté de l'interne parti prendre connaissance du dossier médical pour placer le ballon à oxygène sur le nez et la bouche du patient. En comptant deux insufflations par deux insufflations, il ne put s'empêcher de penser que la nuit allait être longue.
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