Stéphane ne savait pas exactement comment loger le dénommé Fanfan. Tout ce qu’il avait c’était ce qu’il lui avait confié. Il dessinait et faisait des portraits les jours de marché dans la ville. Pour une fois, la chance était de leur côté, on était mercredi. C’était donc le jour du marché des Couronneries. Seulement quand ils arrivèrent sur place, la place de Coïmbra était presque vide. A part les commerçants ambulants qui vendaient des produits de bouches et quelques marchands de cuir, personne. Quoi qu’il en soit, après avoir fait le tour une première fois, il ne trouvèrent pas trace de Fanfan. Avec la cuite qu’il s’était pris la veille, on pouvait penser qu’il devait encore cuver. A quelques mètres derrière lui, Karim était au téléphone. Sans doute allait il être rappelé. Drôle de vie que la sienne. Sacré dévouement aussi. Il n’irait pas lui dire mais quelque part, il l’admirait. Pour lui c’était normal. Pour tous les autres c’était héroïque. Ils avaient, lui et ses collègues, le courage chevillé au corps. Sacrée leçon. Et dire qu’il ne lui avait même pas demandé comment ça allait, trop concentré à lui raconter ses déboires avec l’administration et la police. Et le pire dans tout ça, c’est qu’il avait eu la patience de l’écouter. Égal à lui même. Alors que l’appel s’éternisait, Stéphane décida de demander de l’aide. Il s’arrêta à l’étal d’un maraîcher et lui acheta quelques tomates. - Merci. Dites, vous ne connaîtriez pas un jeune homme qui fait des portraits ? - Si bien sûr, Fanfan. - On m’a dit qu’il avait un sacré coup de crayon. - Ah ça pour sûr. Et il est toujours généreux avec nous. - C’est-à-dire ? - Ben il a pas d’emplacement, alors on se débrouille si vous voyez ce que je veux dire. - Je vois. Et vous ne sauriez pas il est aujourd’hui, j’aimerais faire une surprise à mon pote. C’est son anniversaire. - Je l’ai pas vu ce matin. Mais attendez. Claude ! Oh ! Claude ! T’as vu Fanfan aujourd’hui ? Le charcutier rentra sa tête dans son camion et encaissa le rôti qu’il venait de vendre avant de sortir par la porte arrière et de les rejoindre. - Salut Pierre. Monsieur. - Je l’ai vu se coller contre le U. Y a de la place aujourd’hui. Qu’est ce que tu lui veux ? - Le monsieur veut lui faire faire un portrait. - Alors direction le U de l’autre côté de la place. - Merci messieurs. - A votre service ! Stéphane les salua à nouveau comme ils reprenaient leurs affaires et alla vers Karim en lui faisant signe de le suivre. Karim lui dit néanmoins d’attendre. - Ok. Je comprends. Bon courage et à demain. - Qu’est ce qui se passe ? - Le père de Fanfan vient de décéder dans la nuit. J’ai demandé s’il pouvait voir sa dépouille mais… - Mais ? - Mais le protocole sanitaire est extrêmement strict. Il ne pourra même pas le voir en chambre mortuaire. - Merde. - Tu sais où il est ? - Suis moi. Quand il arrivèrent au coin du U , il le virent en train de dessiner le portrait d’un jolie blonde et rire avec elle. Ils semblaient heureux et comme extérieur à ce qui plongeait la France dans l’angoisse. Alors ni Stéphane ni Karim n’eurent le courage de les déranger. De les déranger pour leur rappeler la réalité du monde actuel. Le leur semblait plus joyeux.
15
Intouchable
L’ANTIDOTE
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