Karim était rentré chez lui uniquement parce que son portable avait la batterie à plat. Et qu'il lui était impossible de relier le lieu il se trouvait du lieu qu'il voulait rejoindre. Il ne ferma pas la porte de son appartement à clé. Les voisins étaient rentrés en même temps que lui. Ils avaient essayé de parler. Il avait juste fermer la porte. Il avait entendu la jeune femme dire à son jules « non mais quel connard ». Il l'avait déja oublié en relançant son ordi, dans la chambre d'ami qui allait un jour devenir son bureau. L'appareil mit un peu de temps. Il regarda son paquet de cigarette. L'écran lui demanda son mot de passe. Il poussa le paquet avec la souris, se connecta à sa session et lança google earth. Même pas deux minutes après, il descendait difficilement son vélo des quelques marches qui séparait son appartement de la rue maillochon. La porte fermée, il réajusta son sac. Le marteau avait du mal à ne pas lui masser brutalement les lombaires. Il enfourcha sa monture et alluma sa clope. Il se sentait puissant. Puissant et déterminé. Puissant, déterminé et sans rien à perdre. Plus rien. Le temps de retrouver le viaduc Leon Blum et sa clope était au filtre. Il cracha le mégot sur le bitume et entreprit la descente jusqu'à la porte de Paris. il piqua direction Les Couronneries. Il regarda sa montre, 16h15 environ. Le gars devait être chez lui. Sur les papiers auxquels il avait pu accéder, il était fait état que Primoschka Woscanicz logeait chez son fils, Primos, maçon. On était samedi. Soit il faisait du black à ce moment il se casserait le nez ; soit il veillait sa mère, qui était reparti des urgences avec un traitement antibiotique, une paire de bas de contentions et le diagnostic d'une infection urinaire. Cette option lui semblait plus juste. Il l'espérait. Il ne voulait pas tomber face à la grand mère. Ça lui couperait les pattes. Lui ferait oublier le pire. Lui ferait sourire. A cette femme qui venait encore d'être déporté à 83 ans dans un pays inconnu. C'était le fils qu'il voulait. La côte avait un dénivelé de 10%. Avec le marteau, et le poids du vélo, un vieux VTT que ses parents lui avaient offert, il y a peut être 15 ans, et sa peau cela faisait lourd à traîner. Il enclencha le petit cran et commença à mouliner le nez dans les gaz d'échappement. Quand il passa la boulangerie industrielle à l'entrée des Couronneries, il n'avait plus rien dans les jambes. Il s'arrêta sur le côté. Pour reprendre son souffle. Un vrai supplice. Comme un con, il avait loupé l'interdose de morphine pour sa côte. Il serra des dents et bascula son sac à dos sur le guidon. Le marteau était toujours là, avec la carte qu'il avait imprimé. Histoire de s'assurer d'aller droit au but. Il rangea le tout une fois son pouls redescendu et reprit la route. Le faux plat jusqu'à la place de Coïmbra lui sembla aussi agréable qu'une journée de printemps. Il tourna comme pour rejoindre le complexe de la pépinière et trouva le lotissement, non loin de l'école primaire Andersen. Il fit le tour jusqu'à l'impasse et chercha le bon numéro. Au 13, l'adresse exacte, le nom n'était pas celui attendu. Premier imprévu. Il se mit à tourner et retourner son document et commença à se gratter la tête en regardant à la ronde. Ce qu'il espérait ne tarda pas. - On est perdu ? - Bonjour monsieur. Oui et non. Je cherche M. Woscianicz. Mais au 13 c'est pas son nom sur la boîte. - C'est normal. Il loge avec deux autres gars. Des maçons comme lui. C'est Duskiewicz que vous avez vu, c'est ça ? - Oui. Oui, c'est ça. Et vous savez si il est là ? - Ah ça je peux pas vous dire. Ce sont des gens discrets. Et puis vous comprenez , la langue... En plus mon jardin est de l'autre côté, y pourrait frapper à ma porte que je les entendrait pas. Excusez moi, mais vous êtes ? - Un ami. Merci en tout cas. - Pas de quoi. Vous pouvez toujours essayer, si il y a quelqu'un il vous ouvrira. Deuxième imprévu. Il ne vivait pas seul avec sa mère. Et il y avait quelqu'un qui pouvait l'identifier si toutefois il parvenait à ses fins. Troisième imprévu. Il marcha, le vélo à la main, et le marteau sur les reins, jusqu'au 13 et sonna. Il entendit un « attends » en mauvais français puis le visage de celui qui lui avait cassé les côtes pile au moment la porte et lui n'était plus qu'à quelques mètres. L'espace d'une bande de verdure remplis de jouets d'enfants les séparaient. Le type ne bougea pas. Il était plus surpris que Karim avait peur. Sans réfléchir Karim brisa le temps en suspens. - Je sais vous habitez. Bonne journée. Et oh, comment va la maman de Primos ? Il enfourcha son vélo et parti à toute vitesse. La boite aux lettre cinquante centimètre devant lui le stoppa net. Il entendit un rire gras depuis la maison. Et des paroles qui lui était destinés aussi. En polonais sans doute. A la peur s'ajoutait maintenant la honte , il se releva et de rage défonça la boite aux lettres. Des papiers se coincèrent dans sa roue. Il les enleva et les fourra dans ses poches avant de partir aussi vite que son ego était meurtri.
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