Le petit matin était là. Stéphane le devinait à travers les raies des stores de l'appartement il était cloîtré depuis deux jours maintenant révolus. Les types, une fois qu'il eut entendu leur appel, l'avaient collé dans le premier appartement en entrant. Ils lui avaient dit qu'ils reviendraient. Et aussi de fermer sa gueule. Sans préciser quand ils reviendraient. Ni avec qui. Il avait alors suivi le manège des voitures de polices et des portes que l'on frappe avec force. A côté de lui. Au dessus de lui. Il entendit toute une flopée d'insultes. Et des coups aussi. Puis les voitures étaient parties. En silence. Depuis il n'avait pas fermé l’œil. Et personne n'était venu le voir. La question qu'il s'était posée en décidant de répondre à l'appel des gars de l'horloge ne trouvait toujours pas de réponse maintenant que le soleil se levait. Peut être ne savaient ils pas pourquoi les flics le coursaient. Peut-être. Lui savait. Il avait eu l'info à peine quelques heures avant que Jallais et sa bande ne débarque pour le serrer. « Un haut fonctionnaire européen en visite sur le Poitou-Charentes a été retrouvé brûlé vif devant l'église du village martyr d'Oradour sur Glane . La piste terroriste n'est pas écartée. -Source AFP- » Quand son smartphone lui avait donné l'info, il avait eu comme un mauvais pressentiment. Et il s'était transformé en mauvais karma avec Jallais. Avant de virer à la mauvaise blague maintenant. Le jour n'allait pas l'aider. Le boucan de la nuit précédente non plus. Et les types qui l'avaient planqué certainement pas non plus. Il se demandait ce qu'ils allaient lui demander. Lui savait déjà ce qu'il était prêt à accepter. Rien. Il se leva pour s'étirer. Ses côtes lui firent mal. L'adrénaline partie, sa jambe avait du mal à le porter aussi. C'est à peine s'il ne boitait pas. Autour de lui, ce qui devait être un studio était rempli de cartons de lecteur dvd, de box internet et d'emballages de smarthpones. Des puces étaient posées aussi. Une colonne d’où rien ne dépassait, jurant avec le bordel qui régnait. Les chiottes fuyaient si fort, qu'il se demandait combien de mètres cubes pouvaient s'échapper en quelques secondes. Il alla vers elles et pissa un bon litre. Sa gorge était sèche pourtant. Il souleva le couvercle des chiottes. Couvert d'une espèce de pâte couleur lait, il sut que ces gogues étaient mortes. Il ne pourrait prétendre à ça comme monnaie d'échange. Finalement, il revint se poser contre le mur donnant sur la rue et regarda la poussière dans les jets de lumière que les stores laissaient passer. Il respira un grand coup et se dit qu'il n'avait pas à regretter. Son smartphone vibra à ce moment là. Même pas un appel masqué. C'était Favreau. Il jeta son téléphone contre le mur et le finit au talon avant d'en extirper la puce et de la casser en autant de morceaux qu'il pouvait. Oui. Il ne regrettait pas. Il ne regrettait rien. Ni sa fuite. Ni ce qu'il s'apprêtait à faire. Trop de fois, il avait suivi les forces de l'ordre. A chaque fois il en était sorti meurtri. Il ne se ferait pas baiser cette fois ci. Il allait se démerder seul. Avec les flics au cul peut-être, mais libre. Le serrure tourna comme il se demandait jusqu'à quelle point on l'avait mouillé dans cette affaire. - Debout Stef. La voix est libre. Un grand black sec comme une herbe folle le regardait du sommet de la porte et l'invitait à s'avancer. Le gars n'avait pas l'air vindicatif. Ni amical. Seulement soulagé. Quand il reprit la parole, il eut l'impression de le connaître. Les flics ont tourné toute la nuit mais jamais ils pensent à ce putain de cagibi. Si tu files vers l'ouest tu sais tu peux t'arrêter. Tu seras en sécurité. Parole de Diakité. A l'est, tout est mort maintenant pour toi. Un conseil ne reviens pas en arrière. Bon vent. Le type avait déjà disparu. Lorsqu'il sortit sous le porche de l'horloge, Diakité faisait écran avec ses gars et il ne chercha pas à aller contre le vent. L'Ouest. Les Couronneries. Diakité. En arrivant sur les bord de la rocade intérieure, il se dit que les morts n'en finissaient jamais de vous parler.
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L’ANTIDOTE
Le vent va tourner
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