La faculté de Lettres et Sciences humaines de l'université était sur le campus principal. Coincée entre le quartier de Beaulieu et le C.H.U. de la Milétrie. étaient agglomérées les principales filières de l'Université, des sciences éco aux sciences dures. L'amphi principal de la fac de Lettres était presque à la fin du campus. Seuls restaient quelques bâtiments annexes avant de rejoindre la rocade extérieure et quitter la ville. Idéal comme situation. Pour les dealers. Pour Stéphane. Cela lui rappelait ses tous débuts. Ceux avec Big O. Quand, tous les deux, des rêves pleins la tête, ils s'étaient fixés six mois à vendre matin et soir avant de se faire la malle à New York. Une autre époque. Une autre insouciance. Maintenant Big O était mort et il ne craignait pas de se faire serrer par les flics. Il bossait avec la plupart du temps. Quant à New York, il allait devoir vendre à sacré paquet de boites de conserves avant de ne serait ce y passer une semaine. Néanmoins, se replonger dans ces souvenirs lui donnait le sourire. C'était le bon temps. Celui des vingt ans. Il rangea le sachet de beuh que les mecs de Saint Éloi lui avaient finalement vendus moyennant un billet de 500 sous le siège passager de sa Kangoo et sortit pour rejoindre le hall de la Fac de Lettres plus au sud. Il connaissait suffisamment Sryk pour savoir que ce qu'il lui disait était censé. Mieux. Vrai. Ils se connaissaient depuis le début. Sryk avait commencé par se faire payer en marquant des zones. Attendant patiemment que son art devienne prisé par les services de la ville, il avait collé à plusieurs reprises le Reush de Big O et lui sur les tours des Couronneries et de la Fac. Depuis il ne touchait plus à ça. Plus besoin. Il exposait à Paris et dans toute l'Europe. Mais vivait toujours à Poitiers. Et connaissait encore le pouls de la vie souterraine. Alors Stéphane se posta à l'Ouest de la grande baie d'entrée de l'amphi et commença à observer. Des regards se posèrent sur lui quelques moments puis, sans bouger, il devint à son tour un élément du décor et plus personne ne levait d'yeux intrigués sur lui. Il était dans la place. Vers 11h30, les premières fragrances de beuh et de shit se firent sentir à mesure que les étudiants venaient s'asseoir anarchiquement dans le semblant de par terre à l'opposé de sa position. Stéphane, lui, attendait. Il attendait d'entendre leurs conversations. Il attendait de savoir à qui il avait à faire. Bientôt le flot d'étudiants se tarit. Et enfin il entendit ce qui se disait de l'autre côté du bâtiment. On parlait des cours. Sans intérêt. On parlait aussi de partiels. Barbant. Mais on parlait aussi politique. Bien. Très bien. Des retraites. Ouais. Du réchauffement climatique. Parfait. Et puis, tout au fond sous les arbres, on pestait de ne plus avoir de matos. C'était sa chance. Stéphane commença à s'approcher, écouteurs dans les oreilles, mains dans les poches, casquette vissée bien bas et à traverser le terre plein comme s'il allait à un endroit bien précis avec une idée en tête. Invisible. Puis, il se posa à à peine 5 mètres du groupe en rade, sortit son sachet de beuh et commença à rouler sans lever les yeux. Ce qu'il attendait arriva sans attendre. • Excuse moi, t'aurais du rab', on est sec. La gamine était mignonne. Un cheiche autour du cou, des longs cheveux blonds vénitiens et des yeux bleus azurs. Mince, élancée, elle était gracieuse. Derrière elle, deux autres le regardait, aussi jolies bien qu'un peu plus BCBG. Trois paires de regards dans l'attente. C'était le moment. • Beuh ou shit ? • Ca dépend. Tu le fabriques toi même ? • Ouais, j'ai une usine d'huile d'olive à Corléone. • OK laisse tomber. • Ouais toi aussi. La drogue tue. • Connard ! Il les regarda se lever. Puis le traiter d'enculé et lui jeter un regard de travers avant de filer vers le resto Universitaire. Il en devait une à Sryk.
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