Karim, accoudé au muret de la concession Renault de Migné Auxances, attendait sagement son tour. Sa cadre avait moyennement apprécié le motif de son absence. Vandalisme. Il n’y avait pas d’arrêt de travail pour cela. Peu importe le médecin. Elle avait accepté tout de même. Sous condition. Qu’il revienne 6 jours de suite dès demain. Autant dire qu’il lui rendait service plus que l’inverse. Il était 14h30, il était depuis 8h30, quand le mécano avait emporté sa voiture. Après celle garée derrière lui. Et avant celle garée devant lui. Maintenant ils étaient une petite trentaine à sortir au compte goutte du garage renault minute. Avec une bonne grosse facture pas prévue. Et, vu l’heure, beaucoup étaient au téléphone avec leurs employeurs. A expliquer le pourquoi du comment. A se débattre pour ne pas perdre leur emploi dans certains cas. Certains commençaient à s’impatienter sérieusement, allant jusqu’à harceler les mécanos qui restaient de marbre. Bel exemple de stoïcisme. C’était d’ailleurs le seul comportement à choisir. Rester patient. Et fataliste. Les salopards. Le pire était que le ballet des auto remorques semblait ne pas devoir s’interrompre. Il en arrivait toujours une toutes les dix minutes. Cela avait créé une forme de rassemblement devant les portes du garage. Ceux de sa rue, sans doute les premiers frappés avaient toutes leurs chances de récupérer leur voiture avant ce soir. Pour les autres… Karim se décolla du muret et s’avança pour voir était sa voiture. Il devait encore porter plainte ce jour pour récupérer le fric qu’il allait avancer. Et il ne savait pas à quelle heure fermait le commissariat. Ni même duquel il dépendait. Un rapide recherche sur google lui indiqua le commissariat central. Bordel. En plus il allait devoir se fourrer dans le centre. - Monsieur Jaïsh ? Monsieur Jaïsh ! - Oui pardon excusez moi. - Vous voulez quoi comme pneus ? - Comment ça ? - On vous équipe comme vous l’étiez ou on vous met moins cher ? - Mettez moins cher. - Vous êtes sûrs ? Parce que votre ass… - Merci mais j’ai déjà vu avec eux. - C’est vous qui voyez. Eric, ramène des réchappés pour la sendero bleue ! Dix minutes après il était dans le hall d’accueil de la concession et signait la facture avant de payer. - Bonne journée, monsieur. C’est ça. Bonne journée. Il enclencha la première et se lança vers le plateau. Par chance à cette heure la circulation était fluide. Il attendit un peu aux feux de la rocade mais ensuite tout alla pour le mieux. Il paya le parcmètre et franchit le seuil du commissariat à 15h17. Avec un peu de chance il aurait le temps d’aller jouer un peu. Histoire d’évacuer le stress de la journée. Le hall du secrétariat était haut de plafond et vide en son centre. Adossé au mur face à l’entrée un unique bureau avec un policier qui claudiquait à chaque fois qu’il devait se lever. Karim se dirigea vers lui mais le policier l’interrompit d’un signe de main. - C’est pour votre voiture ? - Oui. - Prenez un ticket. Attendez dans la file de gauche. Non. Votre gauche à vous. Merci. On va s’occuper de vous. Au dessus de la porte commençait la file d’attente, un compteur annonçait le numéro 564. Karim regarda son ticket. 578. Putain. Il n’aurait jamais le temps de jouer. Très vite, il reconnut plusieurs riverains. Certains qu’ils connaissaient un peu. D’autres simplement de vue. Derrière lui, un type discutait fort au téléphone. Il semblait se battre avec son interlocuteur. Karim ne put s’empêcher de tendre l’oreille. - Mais bordel au lieu de vous contenter des chiens écrasés vous feriez bien de vous intéresser à ce que je vous dit. Y’a des malades qui s’amusent à détruire la vie des gens. J’ai des photos putain ! Donnez moi votre mail ou passez au commissariat vous verrez par vous même comme ça. Vous croyez que taguer une voiture de la phrase « Polluer est un crime contre l’humanité » n’annonce rien ?
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