L’ANTIDOTE
La terre oubliée
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Depuis 2017
ALC Prods
- Je suis désolé pour vous et votre ami, Stéphane. Mais la réalité est telle que je viens de vous la dire. Désolé. Rémi Adebayo se leva et serra la main de Stéphane en lui précisant qu’il allait payer la note. Dans le restaurant le Bateau Ivre Poitiers, l’effervescence du coup de feu de midi s’estompait doucement. Un début d’attente se faisait jour au comptoir. Les gens allaient partir vers la suite de leur vie. Vers leur boulot. Leur maîtresse. Leur femme. Leurs enfants. Leurs soucis. Leurs joies. Et tout le reste. Stéphane, lui, n’avait pas envie de bouger. Il n’avait plus envie de bouger. A quoi bon ? Tout ce qu’il avait prévu de faire dans les heures à venir venait d’être sapé par le seul appui qui avait répondu quand il avait voulu se renseigner sur le camp de Queaux. La Police avait passé son temps à le harceler la veille. Toute la journée à lui poser les mêmes questions. Toute la journée à répéter les mêmes réponses. Il n’y avait pas eu qu’un agresseur. C’était comme si tous leur avaient sauté dessus. Et ils se ressemblaient tous. Ils lui avaient laissé la vie sauve uniquement parce qu’ils avaient été dérangé. Par Rémi. Et Rémi venait de lui dire de laisser tomber. Il venait de lui dire comment fonctionnait le camp. Comment la vie s’organisait dans les 10 hectares de cette zone de non droit. Les rondes de la police. Le trafic de drogue. Le trafic sexuel. Les expéditions sur l’A10. Et le temps. Oui. Le temps moyen que passait ces nouveaux migrants qui n’en étaient pas dans le camp. Il avaient été envoyés à Queaux suite au démantèlement de la jungle de Calais. Et avaient apporté leur mode de vie. Leurs espoirs aussi. Il y avait trois clans. Les aflghans, les lybiens et les soudanais. Tous musulmans. Et puis les autres africains, chrétiens ou animistes. Et les femmes avec les enfants. Trois clans. Trois zones. Qu’il fallait respecter. Pour survivre. Respecter et payer. Tous les jours. Pour garder sa tente. Et éviter de se faire violer ou pire. Jouvence travaillait uniquement pour garder sa tente. Et, comme les autres, économiser pour payer son passage vers l’Angleterre. Alors pourquoi les avoir entraîné là dedans si il connaissait les règles ? Pour gagner en respect, évidemment. Auprès de son clan. Seulement Yvan et Stéphane avaient tout foutu par terre en donnant à qui voulait. Ils avaient bousculé l’ordre établi. Et Jouvence en était mort. Stéphane devrait vivre avec ça. - S’il vous plait ! - Oui, monsieur. - Un double Bulleit - Tout de suite monsieur.
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