« Mon Cher Fils, J'aurais aimé être dès tes premiers pas. Dès tes premiers mots. Dès tes premiers actes. Je ne suis malheureusement qu'un fantôme pour toi. Comme tu l'es pour moi . Ta mère, paix à son âme, n'aimait pas la vie. Ainsi à t elle vécu. A constamment la détruire. Te détruisant au passage. Je suis coupable. J'aurais dû... J'aurais revenir t’emmener avec moi. C'était la guerre certes mais l’essentiel y était sauvegardé autant que faire ce peut. Et aujourd’hui tu aurais un foyer. Une famille. Un frère. Une sœur. Et une femme qui t'aurais aimé comme son fils. Ils s'appellent Karatic. Ils vivent à Francfort. Au 1, Strassheim Builde. Ils sont heureux. Je les ai sauvés. Sauvés de Croatie. A une époque l'Allemagne aimait encore ses semblables. Ils t'accueilleront bien. Ils t'aimeront. Ils te reconnaîtront. Jamais je n'ai oublié de leur rappeler que tu étais des nôtres. Mais aujourd'hui, je suis proche de toi, parce que pour moi c'est la fin. Je vais mourir. Le crabe comme vous dites. Dans les poumons. Même ton ami n'y pourrait rien. Je voulais que tu saches tout cela. Que tu n'as jamais cessé d'être avec moi. Que toute une famille te connaît, même si elle ne t'a jamais vu. Et je voudrais que tu fasses une chose pour moi. Pour le sang. Ta sœur. Ta demi sœur Anna souffre. Elle souffre de l'injustice du monde comme j'en ai souffert. Mais je suis trop faible pour la suivre. Je voudrais que tu le fasses. Pour moi. Pour ce qui, je le sais, ne manque pas de te consumer. Elle est en France. Quelque part. A préparer le pire. Je ne peux que te demander de m'excuser. Un jour tout cela sera clair pour toi. Mais maintenant, tu dois sauver Anna. Tu dois sauver ta sœur. Elle te ressemble. Froide et tendre à la fois. Empêche de commettre le pire. Empêche la de faire ce que je n'ai pas su prévenir. Pour cela viens à la maison. Et suis sa trace. Je t'aime. Je t'ai toujours aimé, mon fils.  Viens moi en aide.» Stéphane détacha sa ceinture et écouta la voix de l'hôtesse leur dire en anglais qu'il pouvait commander des boissons et des sandwichs au personnel. Puis il replia la lettre et repensa à Karim. Il en avait sans doute fait un peu trop. Un peu trop dans le bonheur et la joie retrouvés. Quelque chose de dissonant. Un larsen qu'il savait son ami à même de reconnaître. Il n'avait plus qu'à espérer qu'il ne lui vienne pas l'idée de le suivre. Trop tard. Trop peu, aussi. Il ne saurait aller ni comment. Il était seul maître à bord. Il tira de l'enveloppe la photo qui était avec la lettre. Il avait beau regarder encore et encore, il ne ressemblait pas à son père. Pas du tout. Il était le portrait craché de sa mère. Un visage autrefois poupin aujourd'hui mordu par les poils. Et le crâne sec. Sec comme son regard. Loin du cœur tendre qu'il lui prêtait. S'il l'avait suivi, ce devait avoir été de loin. La vie n'avait pas épargné Stéphane. Et plus rien ne le consumait. Pas même le Destin du Monde. C'était même le dernier de ses soucis. Ce qui faisait qu'il était dans cet avion, c'était la femme qui se tenait à côté de lui, au dessus du bambin et de sa sœur. Elle portait un voile. Elle était irrésistiblement belle. Et, sans qu'il puisse l'expliquer, une aura émanait d'elle, qui lui disait que tout irait bien. Que tout s'arrangerait. Qu'il n'avait rien à craindre. Plus rien à craindre. C'était elle. Elle qu'il voulait voir. Cette figure maternelle qui lui avait tant manqué. Il rangea la photo en soupirant un grand coup et regarda l'heure. Il avait deux heures à tuer avant d'arriver à Francfort. Après il devrait encore trouver l'adresse. Et enfin prendre contact. Alors là, il saurait. Si son père était un homme. Ou juste une chimère.
15
chapitres
>>
<<
Depuis 2017
ALC Prods
Le masque sous la peau
L’ANTIDOTE