Stéphanen'avaitpasaussibienmangédepuislongtemps.Très longtemps.Avraidire,iln'avaitjamaisaussibienmangédetoutesa vie.Sabellemère,étaitassiseenfacedelui.Elleledévoraitdes yeux,lesourireauxlèvres,commeilvenaitdedévorersesplats. C'étaitpeudirequel'accueilétaitchaleureux.Parchance,sonpère n'avaitpasoubliésalanguematernelle.Elleparlaitdoncfrançais, unfrançaisapproximatifcertes,maiscompréhensible.Celafaisait d'elleunevéritablepolyglotte.Lecroate,salanguenatale, l'allemand, sa langue d'adoption et le français, celle de son amour. •Tuasaimé ?Tuenveuxd'autre ?J'aidesprofiterolesencore, si tu veux.•Ohlà,nonmerci !Cen'estpasqueçanemefassepasenvie tanttoutcequevousm'avezserviétaitdélicieux,maisjeneveux pas,pournotrepremièrerencontrevouscontraindreàm'emmeneraux urgences !Elle rit de bon cœur. Elle encaissait bien la chose finalement.Tantmieux.Leplusgrosmorceaurestaitàvenir.Siellesavaitson marirongéparlecrabe,ellenesoupçonnaitpasquesafillefuten dangeretquec'étaitlàlavéritableraisondelavenueenFrancede sonépoux.Ilredoutaitlemomentoùilallaitdevoirévoquersafille avec elle. Peut-être pourrait il compter sur son demi frère.Oui. Peut-être.C'étaitluiquiluiavaitouvertlaporte.Iln'avaitdéceléaucune ressemblance,loins'enfaut.Stéphaneétaitdanslamoyennepour tout.Sondemifrèreavaitlaprestancedeceuxquisemblentrégirle monde.Samoustacherajoutantàl'impressiondesetrouverfaceàune noblepersonne.Pourtant,ilyavaitquelquechose.Quelquechosede leurpère.Qu'ilsavaientdanslesyeux.C'étaitquelquepart,dansle regard.Uneformededéterminationetdevolontés'enéchappaitpar moment.Lesgènesqu'ilspartageaientnedevaientdoncêtre qu'invisibles.Ill'avaitsuivietprésentéàsamèrequin'avaitmême paspleuréàl'annoncedudécèsdesonmari.Elleyétaitpréparéde touteévidence.« Aumoinsilavuvousavantdepartir.C'estbien . Allez,venez »Etilavaitsuivilesdeuxpersonnesquifaisaitdelui unhommequin'étaitplusseuljusquedanslachambred'ami.Ilslui laissèrentletempsdedéfairesesaffairesetdesereposer.Quand Stéphanesentitlespremièresfragrancesdurepas,ilrejoignitle séjourdelamaison.C'étaitunepièceboisée,avecunecuisine américaineetungrandsalondanssonprolongementavecàsadroitela tableàmanger,dumêmeboisfoncéqui,grâceàlalumièrejaune donnaitdesaccentsscandinavesàl'intérieurdelapièce.Loindece qu'ils'imaginait.Loinduclichésurlarigueur,l'austéritéet l'espritrationnelquel'ons'imaginaitlesallemandsmettreentoute chose,ycomprisleurintérieur.Celalefitsesentirbien.Iltourna latêteverslatélévision.Lesinfosencontinu.Enallemand.Rienà comprendre.Toutétaitditdanslesimagesdetoutefaçon.C'étaitla grèvechezlesmétallos.Eteuxnedéfilaientpas.Deschiffres défilaientenbasdel'écrandessommescolossales.Sansdoutela manque à gagner pour les patrons.Unautremondepensatilenrejoignantsonfrèreàsoninvitation.Il parlait un français impeccable. • Donc tu es commerçant, c'est ça ? • Oui. Je tiens une petite supérette de quartier. • Les affaires marchent ? • Faut pas se plaindre.•Ilparaîtquevotregouvernementvoustaxeavantquevousne gagniez le moindre centime. C'est vrai ?•Oui.L'URSSAFétaitmonpremiercréanciereneffet.Tuconnais bien la chose, on dirait. Tu travaille dans les affaires toi aussi ? • Non. Je suis professeur d'économie à l'université de Francfort. • Oh. • Ne t'inquiète pas, c'est pas contagieux.Iléclatèrentderireensemble.Déjàuneformedeconnivence.Stéphane se dit que c'était le bon moment. Ici, ce n'était pas les vacances.Oui.Il avait une mission Et une vie à sauver. • Dis moi ta sœur... • A table !Ilrejoignirentlatableàmangeretlerepaspassaàmieuxse comprendre.Aprèsl'affairedesprofiteroles,sabellemère,avecson aidedébarrassalatableavantqu'ellenel'expulsedelacuisine.Son demi-frère,Frederic,luiditdenesurtoutpasinsister,unclin d’œilàl'appui.Ilseretrouvèrentdoncànouveausurlecanapé.Là, Stéphanen'eutpasbesoindeposerdequestion,sondemi-frèrelui promit des réponses sans qu'il ne les demande.•Demainsoir,jet’emmènelàoùnousallions.Elle,moiet quelquesamis.Jesuissûrqueçavateplaire.Maiss'ilteplaît,ne parle pas de ma sœur à qui que ce soit. Surtout pas à ma mère. • Ah. • Tu ne connais pas les mères musulmanes. • Pas vraiment non.•Ellesontterriblesetintransigeantes.Surtoutquandonleur ment. • Et ta sœur...•Oui.Sibienqu'ellenefaitpluspartiedecettefamillepour elle. Elle l'a reniée. Tu comprends ? • Oui.•Alorsdemainonvaboireunverredanslequartierquej'aime point barre, ok ? • Pas de problème.Stéphaneregardasondemifrère,setournerverslatéléetnesutque penserdecequ'ilvenaitd'entendre.Ilsavaitparcontrequecelui qu'il côtoyait avait dans la voix quelque chose qu'il avait déjà connu