Ils s'étaient ratés. Parce qu'ils avaient ses filles, Noé avait prendre un train de milieu de matinée. Karim, lui, n'avait pas attendu. A 8h43, il descendait de son TGV pour entrer dans la gare de Nantes. Elle était bondée. Beaucoup d'hommes d'affaires. Et de traînards. Cette espèce au look de clochard mais au portefeuille des hommes aux attachés case. Il alla se prendre un café au Paul à l'angle ouest du rez de chaussée de la gare. Vue imprenable sur ce qui entrait et sortait. Aussi bien des quais que de la rue. Et c'était le même ballet. Trainard et busy men. Il regarda son portable. 9H02. Le temps allait être long avant l'arrivée de Noé. Son train partait à 10h32 de Poitiers. Avec un crochet par La Rochelle. Il ne serait pas avant le début d'après midi. Il aurait bien bu une bière. Ou n'importe quoi. Histoire de voir le temps s'accélérer et lui ralentir. Oui. Il aurait bien replongé. Il appela Aïsha à la place. Messagerie. Elle était du matin. Salut, c'est moi. Je suis bien arrivé à Nantes. Pour l'instant je suis à la gare. C'est fou le nombre de gens qui prennent le train. Noé devrait arriver en début d'après midi. On est large. J'espère juste que l'info du fils Karatin est fiable. Bon, j'arrête de t'embêter. Bon courage. Bisous. Tu me manques. Il régla son café et sortit de la gare. Il constata que des stigmates des derniers affrontements entre ultra gauche et police étaient encore visibles. Côté sud, toutes les baies vitrées étaient toujours étoilées. Il se passait quelque chose ici. C'était évident. Il fut surpris de tomber sur une sorte de 2 fois 2 voies . D'habitude les gares étaient si vieilles qu'elles étaient dans le vieux centre ou pas loin. Cela le désorienta un peu avant qu'il ne remarque, de son côté, un peu plus au nord, une ribambelle de cafés ou les valises de voyages posées au sol à côté des tables étaient légions. Ce devait être ceux qui attendaient de partir. Qui avaient le temps. Il remercia un automobiliste qui le laissa passer et s'assit à une table en plein milieu des touristes. La pire qu'il puisse trouver selon ses critères. Il était comme cela exposé. Pas à l'abri. Il consulta encore son téléphone. 9H45. Trop tôt pour appeler Noé. Pas Stef. Il devait être en train de déjeuner avec sa belle famille. Salut Stef. C'est Karim. Les vacances sont finies. On a retrouvé ta sœur. Enfin normalement. Retrouve nous à la ZAD de Notre Dame des Landes et tu devrais avoir l'occasion de la rencontrer. Pour info. Les vieux amis savent lire le visage d'un proche même quand il ment. Allez ramène toi. Bisous. Le serveur déposa son café comme il raccrochait. Il ne fit pas attention mais les gens autour de lui lui jetaient tous des regards de biais. Et en l'espace de la demi heure qui suivit, alors qu'il s'était décidé à commencer à lire le livre que lui avait acheté Aïsha sur une grand mère et son fils, la terrasse ne comptaient que deux groupes qu'il aurait qualifié de traînard. Il vit par contre distinctement l'homme aux dreadlocks qui lui tombaient sur les mollets le fixer avec un grand sourire. Un sourire qu'il garda lorsqu'il l'apostropha. • Tu cherches le nouveau monde, toi ! • Ca se pourrait • T'as un passeport ? • Un passeport ? Pour quoi faire ? • Pour entrer. • Entrer où ? • Bah au nouveau monde. Je cherche juste une amie, un visa devrait suffire. Regarde j'ai la patte blanche • Ah, je vois. Les quatre autres types qui étaient avec lui affichaient le même sourire. Pas un mauvais sourire. Un sourire avenant. Presque satisfait. Tout les gens de bonne volonté sont les bienvenus au nouveau monde. Qu'est ce que tu sais faire ? Je sais soigner les gens. Enfin, je suis pas médecin mais je sais prendre soin. • Alors on va avoir besoin de toi.
25
chapitres
>>
<<
Depuis 2017
ALC Prods
Le masque sous la peau
L’ANTIDOTE