Il l'avait bien mérité. Oui. Après une telle journée, souffler un peu était plus qu'un droit, c'était une obligation. Noé jeta donc le dossier de Favreau sur son canapé, des feuilles glissant jusque sur le sol, accrocha sa veste au porte manteau de l'entrée et fit le tour du bar américain pour ouvrir le frigo et sortir une bière fraîche. Pas que la température extérieure le demande, le printemps restait frais à ces heures, mais simplement parce qu'à l'intérieur il bouillait encore. Son appartement était petit, un T2/T3 avec chambre et cuisine ouverte. Un pièce, qui lui servait de bureau finissait le tout avec les commodités et une salle de bain ridicule. Il avait par contre, une baie vitrée et surtout un balcon qui faisait l'effet d'une troisième pièce. Il avait déjà acheté du mobilier d’extérieur en rotin et alla s'asseoir sur l'un des fauteuils. En contre bas, soit 7 étages, il entendait à peine les Couronneries. Là, il essaya d'enfin souffler. La bière finie, il comprit que c'était peine perdue. Il ne saurait avant d'y être confronté ce qu'il avait provoqué en foutant dehors de façon plus que spectaculaire un proche collaborateur. Les mamies qui attendait pour leur pension devaient être encore pétries de peur. Il faut dire que 110 kilos lancés à pleine vitesse pouvaient impressionner. Il se mit à s'en vouloir. Il aurait régler cela de façon plus diplomate et discrète. La colère l'en avait empêché. Merde. Je les emmerde tous. Il se leva pour aller chercher une autre bière et ramassa le dossier que Favreau lui avait donné. Cela lui changerait les idées. D'après ce qu'il savait, Stéphane était parti retrouver sa belle famille on ne sait où. Et cela inquiétait le commissaire. A croire que ce type, Karatic, n'était pas un humain lambda. Il s'en rendit compte en faisant tourner les pages du dossier. Des mots marquaient sa rétine et résonnaient dans sa mémoire. Guerre des balkans. Épuration ethnique. Casques bleus. Mont Igman. Sarajevo. Dubrovnik. Srebrenica. Mladic. Et puis ces photos sortis d’Auschwitz mises en couleur par les pires pulsions de l'homme. A l'époque, il n'était pas bien vieux, juste assez pour comprendre à quel point tout cela était abject. Aujourd'hui, il savait. L'histoire n'en finit pas de se répéter. Tout comme la cruauté de l'homme n'avait aucune limite. Il but une gorgée et constata que le soleil tombait lorsqu'il voulut commencer à lire la note de synthèse. Le ciel était violet, rose, rouge. Des nuages d'altitude semblait des lambeaux d'arc en ciel. Dessous, la vieille ville commençait à briller. De ci-de de les rues commençaient à être éclairées. Magnifique. Il en profita jusqu'à la nuit et la fin de sa bière puis rentra. Il laissa un filet d'air de la baie et chaussa une paire de lunettes pour soulager ses yeux. Favreau avait piqué sa curiosité. Qui était ce type ? Il allait commencer à décortiquer le dossier lorsque son portable professionnel sonna. Rabotin. Il regarda l'heure. 21 heures bien tassée. • Chef. • Noé. • Que se passe t il ? • Vous êtes dans la merde. • Comment ça ? Je viens de me faire sonner les cloches. Lisez La Nouvelle Presse. En ligne. Noé activa son ordinateur et ouvrit l'onglet de la Nouvelle Presse du Centre. En deuxième position une photo de Christian avec entre guillemets ce qui semblait un arrêt de mort pour Noé. « Le harcèlement professionnel m'a poussé à bout » • L'Enfoiré. • Est ce que c'est vrai ? • Quoi ? • Que vous l'avez harcelé ? Non mais vous vous foutez de ma geule ! Vous n'avez plus de mémoire ? • Bon. Demain. 9h. Dans mon bureau. Avant qu'il n'ait eu le temps de dire quoi que ce soit, Rabotin avait raccroché. Noé resta figé quelques instants puis prit son portable. Et passa le seul coup de fil qui pouvait l'aider. • Commissaire ? • M. Ouedraougo. Qu'est ce qu'il vous arrive ? • Je vous dérange. Non. Je m'apprêtais à laisser les méchants tranquille jusqu'à demain. Alors ? Qu'avez vous ? • J'ai besoin de vos lumières. • Voila qui s'annonce divertissant.
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