Christian Ferjoux avait fait le ménage. Autant que faire se peut. C'est-à-dire depuis suffisamment longtemps pour qu'il n'en soit plus rien. Des cadavres de vodka jonchaient le sol avec les boites de conserves à moitié entamées plongeant Karim dans ses heures les plus sombres. 143 jours. C'était tout ce qui le séparait de cette gabegie. Et c'était peu. Très peu . Surtout en ce moment. Surtout avec ce qu'il traversait. Ses potes ne le savaient pas. Seules Aïsha et Arlette le savaient. Seules elles connaissaient ses limites. Et il savait qu'en venant rendre visite, à la demande d'Arlette, à Christian Ferjoux, il jouait dangereusement avec elles. La soif. La véritable soif. Il n'y a que ceux qui l'ont connu pour la comprendre. Ce serait son point de départ. • Qu'esss tu veux sale fils de pute ? • Je viens de la part d'Arlette. • Cette pute. Qu'esss qu'elle me veut encore cette salope ? • Que vous m'aidiez. Je peux aider personne. Certainement pas toi connard. Encore moins cette salope. • Vous avez écrit, là, au dessus de vous « Venge la ! » • Et alors ? • Alors à vous de me dire. Vous voulez la venger ou pas ? • Casse toi pécore. En disant cela, Christian Ferjoux roula sur le côté de son matelas maculé de tâches suspectes. Il avait du pisser sur ce matelas. Et gerber aussi. C'était le stade d'après. Celui qu'Aïsha lui avait épargné. Jusqu'à présent. Jusqu'à se refermer. Jusqu'à quitter son appartement. Jusqu'à sortir de sa vie sans qu'il ne s'en rende vraiment compte. Ce qui le faisait souffrir un peu plus chaque jour. Ce qui le rapprochait un peu plus de la fin de sa série. Il vit une canette de Kro qui traînait sur la table de chevet. Elle n'était pas ouverte. Vierge. Il n'avait qu'à tendre la main. Et s’asseoir à côté de Christian. Alors le contact serait plus facile. Plus humain. Plus vrai. A une enjambée. La connivence de ceux qui souffrent. Comme porte d'entrée pour arrêter de souffrir. Une enjambée. Putain. Je partirais pas avant que tu m'ai répondu sale connard d'ivrogne. • Répondu à quoi ? • A ma question. Tu veux la venger. De quoi ? • Des enculés comme toi. • Comme moi ? Ferjoux se redressa de sur son matelas et l’ivresse qu'il portait semblait avoir disparu de son corps. Il était là. Il était vraiment là. Avec Karim. Et la grimace qu'il lui montrait ne laissait aucun doute. Celui qu'il recherchait n'était pas un pensionnaire du Centre Hospitalier de Laborit. C'en était un soignant. Un putain de soignant. Un putain de maltraitant. Un enculé de traître. • Dis m'en plus.
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