Karim et Aïsha étaient accoudés au bar américain de la cuisine de l'appartement de Karim comme deux vieux amis qui ne s'étaient pas vu depuis longtemps. Ils discutaient à bâtons rompus de la vie au C.H.U., des conditions de travail, des collègues, des patients, de la vague de décès que Aïsha avait pris de plein fouet en réanimation , de la pluie aussi. Et du beau temps. Il se resservirent un café comme pour marquer une pause. Quand Aïsha avait frappé à la porte de Karim, son cœur s'était emballé. Il l'aimait. Il l'aimait plus que tout. Plus que la bouteille. Plus que sa propre vie. Et il lui avait tellement demandé qu'il n'avait même pas réussi à lui dire bonjour. Elle avait à nouveau coupé ses cheveux très très courts. Elle s'était légèrement maquillée aussi. Il avait l'impression qu'elle était enfin elle-même. Pleine, entière, et soulagée. Et qu'il ne méritait pas une femme comme ça. Elle se contenta de prendre son menton dans sa main et de poser ses lèvres sur sa joue droite. Pas de bonjour. Pas de ça va. Elle l'avait suivi jusque dans la cuisine et s'étaient assis comme si rien ne s'était passé entre eux. Rien de grave. Ainsi s'était passées leurs retrouvailles. Mais au moment de resservir le café, Karim ne put s'empêcher de l'ouvrir. Il le fallait. Il se le devait à lui même. Merci d'avoir témoigné. Je sais que c'était égoïste de ma part. Mais... • C'est moi qui devrait te remercier. Tu m'as libérée. • Libérée. • Tu bois ? • Hein ? • Tu es sevré ? Je n'ai pas bu une goutte d'alcool depuis la mort des russes chez ton frère. • Moi je n'ai pas pris de barbituriques depuis que j'ai témoigné. Karim ne put qu'arrêter son geste. • Bah finis au moins de me servir mon café avant de me renvoyer. • Jamais je ferais ça. • Merci. • Ça...Ça faisait longtemps que... • Depuis que nous nous voyions • C'est à cause de moi ? • Non, c'était ce que tu as découvert et qui refusait de sortir. • Oh. • Je t'aime Karim. Pour ça. Et pour tout le reste. Il ne se jeta pas sur elle et elle sur lui juste à cause du meuble. Ils réussirent quand même à le déplacer dans leur élan. Les tasses tombèrent en mille morceaux. La cafetière tomba en mille morceaux. Le meuble finit à 45° de sa position standard. Puis leurs vêtements commençèrent à tracer le chemin jusqu'à ce qu'ils arrivent à destination. Jamais Karim n'aurait pensé qu'on puisse aimer et être aimé avec autant de passion. Ils y mirent les formes. Ils prirent leur temps. Leur étreinte dépassait la pulsion. Elle scellait leur union. Karim en était sûr. Jamais il ne voudrait partager son lit avec une autre femme.
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Voleur dans la loi
L’ANTIDOTE