Karim avait eu un peu de mal à trouver les locaux de Medicalyse. Leurs laboratoires étaient dans le biopôle mais la partie réservée aux « cobayes » était dans un camion semblable à ceux de collecte de sang. Après être allé il y a deux semaines rencontrer les porteurs du projet, il n'avait pas hésité. Parce que c'était pour la bonne cause. Et parce que cela allait lui permettre de finir beaucoup plus rapidement ses travaux. Il avait lu le document. Aïsha avait lu le document. Sa chef de service aussi. Et les feux étaient au vert. C'était aujourd'hui sa première injection. Son bilan sanguin portait encore les stigmates de l'alcool mais cela ne les avait pas inquiété. Au contraire. Ils étaient ravis. Il toqua à la porte du camion et attendit qu'on vienne lui ouvrir. Il faisait encore frais le matin et il regrettait de ne pas s'être couvert davantage. Il entendit une voix lui dire qu'elle arrivait et il souffla dans ses mains. 1000€ par injection. A raison d'une injection par semaine. 4000 € par mois. Pendant six mois si tout se passait bien. Il voyait déjà sa nouvelle cuisine. Son parquet rénové. Et le mobilier de jardin. • M. Jaïsh ? • Oui. Allez y entrez. Je suis désolé de vous recevoir dans ce camion mais nous avons commencé les travaux avant que notre société ne trouve des locaux adaptés. Le mois prochain, je vous le promets, ce sera ailleurs et mieux ! • Super. Je fais quoi ? Vous ? Vous vous asseyez ici et vous relevez votre manche droite, s'il vous plaît. • Voila. Bien. Je ..vous fais...l'injection. Et c'est bon ! A la semaine prochaine, oh, et n'oubliez pas votre prise de sang dans quinze jours. Certainement ici encore. • Je n’oublierai pas • Alors c'est parfait. Bonne journée M. Jaïsh. C'était bien ce que l'on appelle de l'argent rapidement gagné. Karim avait devant lui une bonne heure à tuer avant de retrouver Aïsha et d'aller voir un film sur un noir chauffé par un blanc. Green book ou un truc comme ça. Il décida de la consacrer à ce qui lui trottait en tête depuis l'une de ses dernières alcoolisations. L'écriture. Il démarra sa clio et alla se pauser à une table du Bateau Ivre. A cette heure le gros de la foule était passée. Les serveurs déjeunaient d'ailleurs. Il s'excusa en commandant son perrier. On lui rendit la politesse avec un grand sourire. Pas étonnant que sa marche. Tout l’hôpital venait ici. Et pas un pour se plaindre. Il se demanda qui était le patron. Certainement un de ses nababs de Poitiers avec parc immobilier et piscine dans le jardin. Et puis même si c'était le cas qu'est ce que ça changeait ? Rien. Les employés étaient sympa. La nourriture de qualité. Et le pinard. Non. Pas le pinard. Il but une gorgée de son perrier saisit son sac et en sortit un cahier de brouillon ainsi qu'un stylo bille. Il était temps d'écrire. De poser ce qui avait germé dans sa tête depuis ce fameux soir. Tout commençait avec le basket. Tout finissait avec le basket. Entre temps, il s'agissait de suivre les aventures de John Carter Jr dans les rues de Métro City. Au fur et à mesure que les mots se déroulaient sous son poing, il prit conscience d'un fait qu'il n'avait pas remarqué en se contentant de le penser. Son écriture avait quelque chose de politique. C'était surprenant venant de lui. A croire que l'écrivain n'est pas ce qui le porte.
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Voleur dans la loi
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