Stéphane avait baissé le rideau de son magasin peu de temps après que Karim et les deux clients qui avaient attendus 14 heures pour se rendre compte qu'il leur manquait quelque chose quittent son épicerie. Il avait abaissé le rideau, pris son ordinateur portable, regardé au moins deux fois s'il n'avait pas eu d'appels en absence sur son téléphone et s'était résolu à traverser le coulée verte pour retourner chez lui. C'était le premier jour de l'été et la chaleur était dense. Une chaleur pictave, presque plus lourde que celle des montagnes, elle vous tombait dessus et vous rendait moite avant que vous n'ayez tenté de vous éventer. Il but pratiquement toute sa canette d'Ice Tea avant de taper le digicode de sa résidence. Le hall d'entrée, d'habitude si chaud lui parut presque frais et il trouva l'air dans le petit ascenseur hautement respirable. En poussant la porte de son appartement, Juliette ne s'était toujours pas manifestée et il dut changer de t-shirt, vaincu par sa transpiration. Il décida de tout ôter et pris une douche jusqu'à ce qu'il ait la peau fripée. Il sortit, consulta son téléphone sans obtenir de meilleur résultat puis ouvrit son ordinateur et fit la caisse de sa journée. Une bonne journée. Il devrait, si le temps restait ainsi, demander davantage de boissons fraîches à France boisson. Peut être devrait il acheter ou louer un de ses frigos en forme d'armoire pour les jeunes. Il regarda les sites dédiés à la fourniture de matériels aux commerçants et constata que l'acheter était pour l'instant hors de propos comme le louer demandait de laisser un peu plus la chaleur s'installer. Il ferma son navigateur internet et rouvrit ce qui lui avait pris toute la mâtinée. Le rééquilibrage de ses comptes. Juliette ne faisait plus partie de sa vie. Il ne la rappellerait pas. Il n'irait pas pleurer sous sa fenêtre. Il ne la dénoncerait pas non plus. Il se contenterait de voir son cœur battre plus fort pendant quelque temps à chaque fois que son téléphone sonnerait et à chaque rousse qu'il croiserait puis tout rentrerait dans l'ordre. Il trouverait une autre femme. Il trouverait quelqu'un de bien. Quelqu'un de mieux. Il trouverait le moyen de vaincre le Destin. Il ne prit pas le temps de relire la feuille de tableur qu'il avait établi dans la mâtinée. C'était peine perdue. Ses produits d'appels devaient changer de nature. Il allait vendre du pain. Du pain bio à marge réduite. Ne lui restait plus qu'à trouver le fournisseur. Et clore son partenariat avec Juliette. Il se leva et alla sa poser devant la baie vitrée. Depuis l'affaire Virandier, il avait acheté son appartement, cassé deux cloisons, désinfecté chaque centimètres carré de l'appartement et refait les peintures à neuf. Il envisageait de refaire les revêtements du sol. La moquette portait en trop d'endroits les marques du fumeur qu'il avait été. Il lui semblât même en cet instant sentir la beuh californienne imprégner son séjour. Il ouvrit la fenêtre et s'arrima au muret de son balcon. Deux étages plus bas et vingt mètres plus loin, les enfants jouaient autour de la piscine. Le premier à y tomber entraîna un jeu d'eau finissant par tremper toute l'esplanade une jeune arrivante avait cru possible de s'y laisser aller au bronzage. Elle battit en retraite, presque apeurée par le vacarme des mômes. Au dessus d'eux tous, le soleil brillait toujours sans qu'un nuage ne vienne leur apporter un peu d'ombre. Stéphane finit par revenir dans son appartement et baissa le store avant que le soleil ne vienne y faire grimper la température. Il ouvrit une bouteille d'eau fraîche et s'écroula sur son canapé. Trouver quelqu'un d'autre. Quelqu'un de bien. Vaincre le Destin. Karim lui avait parler du DJ qu'il avait croisé au Jardin des Plantes quand il avait lui même fait allusion à la fatalité. Le type avait un point de vue intéressant sur le sujet. Il l'avait ruminé depuis tout ce temps, mais ce n'est que maintenant qu'il arrivait à le dépasser. Karim lui avait parlé de bons choix qui s'avéraient mauvais et de mauvais choix qui s'avéraient bons et surtout, surtout, que tout cela échappait complètement à ce que nous étions. Nous étions ceux qui faisions ces choix il fallait en subir les conséquences, bonnes ou mauvaises. Mais à bien y réfléchir, Stéphane comprit qu'aussi implacable soit il, le Destin n'était pas contraignant à partir du moment nous ne lui appliquions aucune connotation morale. Si tout ce qui devait arriver arriverait, alors à quoi bon se demander si c'était pour notre perte ou notre Salut ? Il n'y a pas de Bien et de Mal dans la logique des choses. Seulement celui que nous lui donnons. Et quand nous décidions de ne lui en donner aucun, nous voyions les choses telles qu'elles sont, de fait. Stéphane remit son t-shirt après avoir fini sa bouteille d'eau puis ferma complètement les stores et se saisit de son téléphone. - Salut Juliette, je vais assister à la Fête de la Musique place d'Armes à Poit'. Viens me retrouver. Je serais dans les coulisses. Je donne ton nom au vigile. Il faut qu'on parle.
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L’ANTIDOTE
La nuit de l’abattoir
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