Stéphane avait juste eu le temps de prévenir Karim au moment il reconnaissait la Peugeot. Principalement ses plaques. Et maintenant il regardait à l'intérieur, insensible aux décibels qui ne cessaient de grimper, présage d'un final ultra violent. Autour de lui, il n'y avait quasiment personne. De ce côté de la scène, seul un mur noir et les flashs des stroboscopes le ramenait à la réalité. Il fit le tour de la voiture sans réussir à l'ouvrir. Il n'y avait rien qui y traînait. Il posa son nez desssus, ses mains autour de ses yeux pour mieux voir et chercha un indice qui lui permettrait de prévenir le carnage qu'elle présageait. Il sursauta lorsqu'une canette heurta le bitume chaud à quelques centimètres de lui. Des gamins saouls goûtaient leur première ivresse publique à quelques mètres de lui et le toisaient comme on regarde un clochard incapable de se rendre compte à quel point il est pauvre. Il les laissa à leurs jugement de petits et essaya d'ouvrir le coffre de la 208 en forçant la serrure. C'était peine perdue. Il décolla alors la jointure et réussit à y glisser un bout de ferraille qu'il avait ramassé à côté de la scène. Il sentit le métal se tordre avant que le coffre ne cède et ne lui révèle le contenu du coffre. Un amas de papiers glacés, portant un logo équivalent aux boissons énergisantes et aux fiestas ibériques. C'était donc la voiture de la tête d'affiche qui s'annonçait. Il chercha l'arme qu'il l'avait vu acheter sans grand espoir de la trouver. Il farfouillait encore parmi les flyers lorsqu’il sentit une main lourde se poser sur son épaule droite. - Qu'est ce que tu fabriques l'ami ? - C'est le DJ, il m'a deman... - C'est ça. Ferme ta gueule. Le videur lui tordit le bras et le força à passer devant lui. Il laissèrent l'arrière de la scène sans que quoi que ce soit ne puisse les arrêter. Spectateurs et officiels s'écartaient en tournant le regard vers ailleurs, laissant Stéphane seul face à ce qui s'annonçait. Lorsqu'il se trouva au cœur de la scène, le bruit était devenu paradoxalement supportable. Devant lui, un arabe aux cheveux blonds tirait sur un joint de marijuana. La pièce, délimité par des draps immaculés, ne devait pas faire plus de 4 m². Un épais nuage de fumée en constituait l’atmosphère et un collection irréelle de disques vinyls en redessinait le sol comme un labyrinthe il n'y avait d'autre sortie que celle des décibels. Derrière le DJ, Stéphane reconnut le sac noir et lourd qu'il avait, moins de 48 heures plus tôt, vu être monnayé par Juliette. Il tenta de ne pas montrer qu'il l'avait remarqué. Le videur lui lâcha le bras et le laissa seul face au DJ. Stéphane pensa qu'il devait être le pote de Karim. Celui qui jouait au basket. Celui qui se savait marqué par le Destin. Un Destin qui semblait porté à se montrer ironique en ces instants. Il aurait pu en rire si il n'avait su ce que renfermait le sac et vu la place qui s'ouvrait, bruyante et sans défense, à quelques mètres d'eux. - Alors c'est toi Stéphane - J'ai appelé la police. Tu ne t'en tirera pas - Laisse moi te montrer quelque chose Alors qu'il passait devant lui, et soulevait le drap qui fermait l'accès sud de la loge, Hakim invita Stéphane à le suivre et à venir contempler, dans l'assaut de décibels comme libérées, la foule qui se massait devant eux. Il n'en voyait plus la fin. La nuit s'était posée si fort sur Poitiers qu'il ne pouvait dire et comment finissait sa population ainsi rassemblée. A ses côtés, Hakim semblait comme absorbé par elle, complètement hypnotisé par ceux qui étaient venus l'écouter. Sa voix était à peine audible quand il s'adressa à Stéphane. - Ça fait du monde, hein ? - Ne fais pas ça. - Pas quoi ? - Je t'ai vu chez Juliette. Je sais ce que tu as dans ton sac. - Tu crois au Destin ? - Je crois qu'on a toujours le choix - Toi peut-être. - Toi aussi. - Non. Pour moi, les dés sont jetés depuis longtemps Avant qu'il ne puisse comprendre l'exact signification de son propos, Stéphane vit le poing de Hakim se refermer puis une douleur si vive vint envahir son crâne qu'il n'eut pas le temps d'en saisir l'exact portée ni même la véritable provenance.
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L’ANTIDOTE
La nuit de l’abattoir
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