« Bon Dieu de Bon Dieu, je vais finir par crever de chaud ici nom de Dieu ». Gustave Faucher, dit Gus, venait de livrer son sentiment sur sa situation présente comme il le faisait toujours. Dans le silence et la solitude. Personne ne lui répondrait. Jamais. Il vivait ainsi. Depuis toujours. Heureux de ne partager ce qu'il pensait qu'avec le néant. Il ne croyait plus en Dieu depuis que celui ci n'avait pas répondu à ses suppliques lorsque son père, ce poivrot, passait ses nerfs une ceinture à la main lancée à toute berzingue sur ses côtes. Il n'y avait pas de Dieu. Pas de Dieu pour lui. Tout comme il savait depuis longtemps qu'il valait mieux se taire face à autrui. En toutes circonstances. Les autres parlaient bien assez de toute façon. Et la plupart du temps c'était aussi intéressant qu'un pet de nonne. Il ne les écoutait plus depuis bien longtemps. Depuis qu'il était en âge de comprendre, en fait. Et aujourd'hui le seul qui arrivait à capter son attention était celui qui l'avait libéré du joug de son père. Robert Longeron. Mais à l'inverse de ce seul ami, il n'avait pas suivi le chemin de son aîné ; comme on reproduit le pire en cherchant à l'éviter. Jamais il n'avait bu. Jamais il n'avait maltraité une femme. Jamais , au grand jamais, il n'avait tué d'innocent. Il avait su se contenter des autres. Des pires. Et c'était déjà amplement suffisant. Pourtant depuis peu, il avait un doute. Sur la justesse de ses actes. Rien de bien sérieux mais, comme il épongeait son front et tentait de puiser la force de ne pas aller au robinet de la kitchenette de l'appartement il était, tout de même, son dernier acte sonnait comme celui qu'il n'aurait pas fallu. Pas qu'il n'ait jamais tué personne de plus âgé que lui. Ni même qu'il croit qu'une femme ne puisse pas être aussi retors et perverse qu'un homme. Simplement, le regard de Raymonde Gourdeau avait exhalé tellement d''innocence au moment son esprit partait, qu'il ne pouvait y voir que la fin de sa capacité à distinguer les enculés des bons. Bien sûr il en voulait à Robert et sa folie des grandeurs. Aux autres aussi. Et à la vieille de ne pas s'être défendu. Mais au fond cela l'empêchait de se poser la seule question qui importait. Parce qu'il en connaissait la réponse. Depuis longtemps. Et que de simplement l'énoncer le briserait pour de bon. Il était fini. Il s'essuya le front avec son mouchoir, soulevant sa casquette et se dit, qu'après tout, il ne lui arriverait rien en allant boire un peu. Ses pieds crissèrent contre la bâche qu'il avait étendue par terre dans la chambre. Elle attendait l'autre bougnoule. Robert avait su par les dealers de la mosquée qu'il était sur leurs traces. Et Gus savait que ce n'était sur les traces de personne d'autre que celle de leur partenaire. Eux ne faisait que de l'export. Et ce type s'intéressait à l'import. Ç’avait été facile de les loger. Comme de le reconnaître, collé au cul du trafic qui avait amené les papiers, sa barbe de métèque longue comme celle du Père Noël rendant ses yeux encore plus vicelard que ceux d'un porc. Il ne doutait pas qu'il était dehors à attendre que leur contact vienne prendre la marchandise pour les désosser. Le Boucher d'Alep. Quel nom à la con. Toujours est il que le deal était ce qu'il était. En plus de payer pour les filles, leur partenaire payait pour leur protection. Et leur protection, là, ici, maintenant, c'était lui. L'eau lui fit du bien. Comme un jet d'eau sur une plante verte. Il lui sembla qu'il reprenait même ses esprits. Peut être qu'il avait tort en fin de compte. Peut être que c'était juste le stress et la fatigue. Oui. Peut être qu'il n'était pas fini. C'est avec cet espoir qu'il partit. Son esprit s'évanouissant dans la seconde où Nassim El Jawad le décapitait. Le Boucher prit alors le soin de nettoyer le sol, de ramasser la tête de cet impie et de la poser sur la bâche qui lui était destiné avant de retourner dans le placard d'où il était sorti, à 50 centimètres d'où sa dernière victime avait vécu ses ultimes instants. Il essuya son cimeterre. Et ferma les yeux avant de reprendre la sieste qu'il avait dû interrompre.
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L’ANTIDOTE
La nuit de l’abattoir
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